Articles de barbaraburgos
Parenthèse enchantée
Ces mots mis entre crochets, comme un hiatus, une digression non essentielle (les mots aussi ont des modes et défilent sur les podiums de la collection automne- hiver 2021) . Et pourtant, que de parenthèses enchantées, que de moments qualififiés de "sans importance" s'incrivent en majuscules, sans point ni virgule. Une respiration dans la phrase, un soupir sur la partition, un souffle d'air frais dans la monotonie des jours.
Un carré de chocolat noir, un morceau de gingembre confit et déjà presque minuit. Plus que quelques minutes pour son billet quotidien quand dans cet instant suspendu j'aurais pu croire au divin. Alors la suite demain...
Impressionnisme
Une casserole qui mijote
Un feu crépitant
Un peu souffle de l'océan
Pourtant malgré l'inspiration de cet air nouveau dans mes poumons, pas d'inspiration dans mes doigts ce soir pour retranscrire ces impressions.
Ou trop enivrée d'atmosphère iodée, de liquide bordelais dans des verres à pied.
C'est une idée de vouloir écrire un billet quotidien, si c'est pour parler de rien, ce n'est pas bien malin.
Parler de rien c'est déjà parler de quelque chose, mais là je sens que l'autre va se remettre à dialoguer et je n'ai pas du tout envie de l'entendre. Je vais tendrement me laisser glisser dans les bras de Morphée, grisée par la brise marine et la bouteille divine !
Land(es)' Art
Aller d'un point à un autre. Rouler vers la lumière. Un ciel clair et dégagé. Une sensation de liberté.
Changement de décor, de lit, pas de corps, la métempsychose attendra.
Un coucher de soleil en filigrane dans les pins. Sérénité.
Avenue du Petit Parc ou Jardin des Tuileries, la même impression de fugacité éternelle ou d'éternité fugace.
-Là tu as conscience que personne ne comprend rien à ce que tu écris
-a-t-on besoin de tout comprendre ?
-un minimum quand même
-moi je me comprends en tout cas
-et moi, qui ne suis qu'une autre partie de toi, je ne saisis pas forcément les nuances
-ah, c'est pas simple la vie à deux ! Tu te rappelles tous ces instants ? La couleur du thé au gingembre, la caresse du soleil, les airs d'accordéon. Ces petites choses anodines et la plénitude de l'instant. L'ici et maintenant même si c'est demain et ailleurs.
-oui, oui, je vois vaguement
-tiens en parlant de vague, marchons vers l'océan !
A la source
J'écris souvent à partir d'un mot, d'une phrase lus ou entendus au détour d'une conversation, d'une émission radio, ou à partir d'une émotion, d'une sensation, d'une impression. (la différence entre ces termes pourra faire l'objet d'un autre billet)
Le mot Cythère m'évoque une cithare et c'est parti pour un voyage sur la mer (cf billets précédents).
Aller prendre l'air, forcément Baudelaire.
C'est parfois fatigant mais c'est souvent troublant de relier les mots avec son inconscient.
Et les rêves dérivent, les actes manqués s'esquivent, une erreur de clavier, un message effacé, jamais envoyé ou pas au bon destinataire, la communication et ses mystères.
"Mets à chauffer, j'arrive" peut prêter à confusion selon à qui c'est adressé, à l'employé des pompes funèbres ou à la maîtresse de maison. Tous les deux allumeront la flamme, la finalité sera en revanche très différente. Quoique. Tout ça peut finir en pot au feu, avec ou sans tiret, mais là il faut avoir l'humour noir et l'esprit mal tourné.
-Et tout ça pourquoi ?
-pour expliquer d'où viennent les idées...
-quelqu'un te l'a demandé ?
-non, j'ai juste parfois besoin de m'expliquer les choses à moi-même
-si tu t'expliques c'est forcément à toi-même
-oui je sais, j'ai fait exprès pour te faire parler
- tu sais que tu te parles à toi-même ?
- je sais
- et tout va bien ?
- ça va merci, ça pourrait aller mieux si un virus à picots ne nous obligeait pas à rentrer si tôt
- ça pourrait aller pire
- oui mais mon grand optimisme et ma foi en l'humanité me poussent à envisager le mieux
- là je ne te reconnais plus
-moi non plus !
J'ai fini par me faire taire moi-même parce que je ne m'entendais plus.
Chut
Le bruit du silence
Assourdissant
Lourdes heures immobiles
Les absents
L'écho du silence
Effrayant
Longues aiguilles d'éternité
Le passé
Le murmure du silence
Apaisant
Le temps s'étire
L'avenir
Le silence du silence
Enivrant
Les minutes savourées
Le présent
Pourquoi pas
Partir pour Cythère
Au son des cithares
Avec l'être cher
S'il n'est pas trop tard
Dès potron-minet
Prendre le bateau
Se laisser bercer
Par le bruit de l'eau
S'accouder au bastingage
Regards vers plus loin
Poser ses bagages
En rêvant demain
Pincement de cordes
Un vieux troubadour
D'un ton monocorde
Glorifie l'amour
Partir pour Cythère
Une fois réveillée
Curieuse chimère
D'où venait l'idée ?
J'avais oublié
Le nom de ce rivage
Puis je me suis rappelé
Baudelaire et son fameux voyage
Lucie fait rien
Le mot préféré d'Alain Rey est "luciférien" (Alain Rey, 1928-2020, mon pote radiophonique et celui à* Robert puisqu'il en était le rédacteur en chef).( *je sais qu'on dit "le pote de" mais là j'avais envie de dire "à").
Il en aime la sonorité, l'harmonie syllabique et l'idée de lumière introduite au plus profond des ténèbres.
J'ai souvent parlé à Dieu, jamais à Lucifer. Pourtant je sais que je finirai en enfer pour outrages à la pensée chrétienne.
Lucifer ne me dit rien, pas le moindre mot à mon oreille. Je succombe parfois à la tentation d'une tablette de chocolat, de pluies de nus sur moi, de soirées alanguies dans des sofas, mais il sait que je fais fi de la perfidie, que je donnerais mon foie pour les chers de ma chair, que le sort de mon voisin je n'envie pas et qu'il n'y a pas plus conciliant que moi !
De toute façon, je ne crois pas plus en lui qu'en l'autre, c'est normal me direz-vous, l'un ne va pas sans l'autre.
Je laisse donc Dieu dans son paradis avec Laura Ingalls et Lucifer dans son enfer avec Nelly Oleson, pendant ce temps j'irai voir les nuages spectaculaires dans la campagne alanguie et je dégusterai un chocolat étendue sur mon sofa.
Quant à mon ami Alain Rey, j'espère qu'un luciférien ne lui chatouille pas les pieds dans sa nouvelle demeure d'éternité. R.I.P
Atmosphère
La couleur du temps qui s'enfuit
Visages croisés
Morceaux de vie
Crépuscules lenticulaires
Quand le ciel aquarelle bleuit
Un changement d'atmosphère
S'ensuit
La saveur du temps qui s'étiole
Visages vaporeux
Souvenirs au vitriol
Front nuageux
Quand le ciel pastel devient bleu
Une perturbation atmosphérique
Se peut
La senteur du temps qui s'oublie
Visages troublés
Ambiance extatique
Totale nébulosité
Quand le ciel orageux blanchit
La pression atmosphérique
Se densifie
La couleur du temps qui s'enfuit
Crépuscule lenticulaire
Un changement d'atmosphère
Espère
L'aile ou la cuisse ?
Balade pour se promener ne prend qu'un L. Pas besoin de deux L pour marcher, deux pieds touchant le sol suffisent.
En revanche, deux L pour la ballade poétique et sa musique. Il faut bien deux L pour s'élever dans les airs. Pourtant la ballade répond à des règles de versification très strictes, pourquoi donc ? Là pour que ça marche, il faut plus de deux pieds. Huit ou dix par vers en trois strophes, huit ou dix vers par strophes, plus un envoi à la fin qui en contient la moitié.
Je résume:
- 3 strophes
- 8 vers de 8 syllabes
-1 envoi de 4 vers de 8 syllabes
C'est clair ?
Mais qui en a quelque chose à faire ?
On passe tellement de temps à faire des choses qui ne servent à rien, alors un peu plus, un peu moins, quelle importance !
Ce blog en est un exemple.
Et moi, je préfère les vers libres et les pieds pour aller marcher dans la campagne givrée.
Et avec un ou deux L, je parviens à m'élever au-dessus du sol... la si do. Là avec des si, je pourrais mettre Paris en bouteille, mais peut-être serait-il plus sage d'aller faire do do
A l'aise
J'ai mis le mot alèse sur un matelas, ce n'est pas un mot très joli pour de la poésie
Il faut bien changer ses draps mais ce n'est pas un très beau thème pour un poème
J'ai ouvert la fenêtre pour renouveler l'air
Ce n'est pas Baudelaire qui aurait écrit ces vers
Ni Aragon qui aurait parlé chiffons
Pourquoi toujours chercher des rimes ?
Vouloir toujours voler plus haut ?
Serait-ce un paradigme
Un idéal pour approcher Victor Hugo ?
Pourtant Prévert me demande si je me rappelle que les feuilles mortes se ramassent à la pelle
Bien sûr que je me rappelle puisque j'ai passé le balai
Pardonnez-moi poètes
Maintenant j'enfile une nuisette, je me glisse sous la couette
Je ne suis pas farouche
Comme on fait son lit on se couche !