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Février 2024

Past lives

 

Une flaque troublée
Un reflet
Souvenirs d'enfant
En Corée 
L'une est partie 
L'autre est resté 
Une autre vie 
En occident
Premiers émois
Qui ne s'oublient pas
Instants figés
Dans le passé 

Une flaque troublée
Un reflet
Désir latent
Signe discret
Chuchotements 
Le regard lent
Effleurement 
Un mouvement
Dans un plan fixe
Geste en avant
Sans préjudice
Pour le présent

 

 

 

 

Photographie

 

 

Je prends des photos
A l'écrit
Des clichés
Instantanés de vie
Manuscrits
Feuilles libres ou attachées 

Je zoome sur un fragment 
Une particularité
Une phrase entendue
Un ressenti
Une belle chose aperçue
Une anomalie 

Je fais une mise au point automatique
Une balance des blancs 
Surexposition poétique
Selon l'éclairage du moment 
Objectifs plus banals
En fonction de la focale 

Je prends des photos à l'écrit
Un portrait nuancé par les mots 
L'extrait d'une journée manuscrit 
Instantané 
Fragment de vie 
J'écris des photographies 

 

 

 

 

Bleu bleu

 

 

Eloge de la lenteur
Et des couleurs
Inutile de prendre l'avion
Sillonner les routes de Provence
Hors saison 
Chênes verts
Oliviers
Pins sylvestres
Le décor est planté 
Puissance de la Sorgue 
A sa source
Un monde souterrain 
Les eaux sauvages
En folle course
Jusqu'à l'écluse 
A Fontaine de Vaucluse 
Route touristique 
Vieilles pierres
Panorama 
Gordes en hiver
Haut perché sur son rocher 
Les magasins de souvenirs sont fermés
Pas de cigales et leur mélopée 
Le silence
La clarté
D'un ciel de Provence
Terre ocre
Et rouge flamboyant
Bien plus beau que le Colorado 
Roussillon
Mieux que le grand canyon 
Un peu plus loin
L'air est serein du côté de Lourmarin
Hommage à Camus 
Un salut
Pas de cigales et leur mélopée
Magasins fermés
Le silence
La clarté
Inutile de prendre l'avion 
Éloge d'un ciel de Provence
Hors saison

 

 

Mots tard

Les mots s'écrivent ou s'écoutent
Parfois même ils se goûtent
Des saveurs épicées
Fleur d'oranger 
Un chawarma un mezzé
Ils s'égouttent quand il pleut
Ils se voient ou ils se touchent
Une caresse un baiser
Ils palpitent 
Quand le cœur bat
Il périssent
De vie à trépas
Pages arrachées du dictionnaire
Ils peuvent couler telles des rivières
Se ramasser comme des cailloux
Faire des ricochets de chou à hibou
Ils pourraient se prélasser
Par un soir d'hiver bien froid 
Mais pour cela il faudrait
Que du vrai froid il y en ait

 

 

 

Théorie de l'évolution

Le dodo 
Gros oiseau
Un peu teubé 
Une sorte de pigeonneau
Qui se gavait
De fruits tropicaux
Il en mangeait trop
Tambolacoques
A la toque 
Sans prédateur
Pour lui courir derrière 
Il ne connaissait pas la peur
Et restait sédentaire
Il ne s'est pas plus méfié
Des kilos
Qui l'empêchaient de voler
Que de l'homme blanc
Cet insolent
Venu en conquérant
S'approprier
Des terres inexplorées
Cela en fut fini du dodo
Ce gros oiseau
Un peu teubé
Et pas très beau 
Il s'était laissé aller
Ce pigeonneau 
A manger trop
De fruits tropicaux

 

 

 

 

 

Orthodontie

 

Pourquoi les papiers de bonbons font du bruit ?
Pourquoi les gens mangent des bonbons dont les papiers font du bruit ?
Pourquoi font-ils des bruits de bouche en mangeant leurs bonbons ?
Et pourquoi font-ils tout cela au cinéma ?
Une perte de temps
Une perte d'argent
Ce qu'ils ne savent pas c'est que ce sont des rescapés
Mais qu'ils soient prévenus désormais
Si je les croise à nouveau 
Je leur casse les dents délicatement
Puis je leur démonte le nez
Si tout cela ne suffit pas
Je leur pèterai les tibias
Ainsi quand ils reviendront au cinéma
Ils auront retenu la leçon
Et fini les bonbons
Heureusement que je suis pacifique dans le fond

 

Sagesse

Elle est seule chez elle, des photos exposées trônent fièrement sur le buffet, témoins d'une autre vie, avant
Avant quand elle était plus jeune, quand elle était moins seule
Des cartes postales reçues, à côté des photos exposées sur le buffet
Témoins de douces pensées envoyées de pays où en aucun cas elle n'ira
Elle est seule toute la journée, pourtant elle ne s'ennuie jamais
Vit-elle avec ses souvenirs ? 
Elle est seule et les gestes du quotidien deviennent douloureux, pourtant  elle ne se plaint pas 
Elle regarde les oiseaux qui s'arrêtent pour manger les graines qu'elle leur a laissé
Elle guette les nuages pour savoir si le vent soufflera du marin ou du cers
Elle envisagera d'aller étendre ses draps
Pour qu'ils sèchent au grand air
Puis elle les repassera
Au son d'une émission radio, elle se concoctera un bon petit repas
Un peu de veau en sauce
Parce qu'elle l'aime ça !
Une salade verte
Une pomme reinette ou canada
Ses proches peu à peu
S'en sont allés
A l'heure de la sieste va-t-elle les retrouver ?
Elle est seule et dit merci à ceux qui viennent lui rendre visite 
Elle est seule et c'est ainsi que passent ses journées
Elle a tous ses souvenirs pour compagnon
Elle a toute l'affection de ceux qu'elle a fait grandir
Elle lit en gros caractères des histoires de gens bien plus malheureux qu'elle 
Elle se trouve chanceuse et sourit
Elle sourit malgré les douleurs, malgré les absents, malgré le silence autour
Elle sourit doucement et profite avant tout de l'instant présent 

 

Oupoco

La plume d'un canard pour écrire
Trop tard
Hier a fui aux alentours de minuit
L'Oupoco semblait pourtant un bon sujet
Ni trop ni peu
Il n'eût pas le temps de citer
Même un clavier ne saurait rattraper
Cette heure perdue
Ce moment d'égarement
Une plume de canard pour écrire hier
Trop tard
Mais au présent
Instant parfait
Un glissement sous le duvet 

 

Si seulement je pouvais hiberner

Oulan Bator
Triste décor
Une jungle urbaine
Oubliées les steppes 
Les vastes plaines
Où les ancêtres
Se déplaçaient pour assurer leur subsistance
Le nomadisme a laissé place à l'alcoolisme
La décadence 
Des bidonvilles
Un air vicié
Le paysage est devenu laid
Ville glaciale
Oulan Bator 
Triste capitale
Jungle inhumaine
Trois enfants se débattent
Une yourte sans chauffage pour tout foyer
Une assiette à partager
De l'eau gelée
L'énergie du désespoir de l'aîné
Oulan Bator
Promesses dans le décor
Des rêves en perspective 
Une vie meilleure 
Sérieuses expectatives 
Ici ailleurs
Une même question d'instants
Après l'hiver
Un espoir du printemps 

 

 

 

 

La zone d'intérêt

Il descend l'escalier 
Il lui monte la nausée
Il s'arrête un instant
L'instant est effrayant
En flash back inversé, des agents d'entretien astiquent ce qu'il reste de cette ignominie, aspirent la poussière, nettoient les vitrines témoins de l'innommable. Tas de valises, tas de chaussures, pyjamas rayés.
Retour sur l'escalier
L'homme se redresse dans ses bottes
Dehors le bruit sourd, les cris, les tirs de mitrailleuses
Dans le jardin, les enfants jouent à faire semblant
Ils sont propres, bien nourris, souriants
Pourtant quand vient la nuit, quelques ombres s'immiscent au creux de leurs rêveries
Dans le jardin, les enfants jouent à faire semblant
Et leur maman aussi
Les allées colorées et fleuries
Un manteau de fourrure
Un diamant 
Au loin les cheminées
Le bruit sourd
Les aboiements
Il descend l'escalier vertigineux
Ravale sa nausée
Droit dans ses bottes
Il jouait lui aussi
A faire semblant il n'y a pas si longtemps 
Et puis le bruit sourd
Les cheminées
Les aboiements 

 

 

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