Articles de barbaraburgos

Dans Mars 2021

Trois fois rien

Par Le 12/03/2021

Sur une ligne allant du rien au tout, vers son milieu, il y aurait des petits bouts de rien du tout. Petits bouts de vie, de chemin partagé, petits plaisirs futiles, aussi légers qu'un reflet dans une tasse de thé, une bulle de savon de Chloé, un regard, un effleurement, un désir naissant.
Le juste milieu peut sembler ennuyeux. "Je ne m'attendais pas à ce que ce soit comme ça la vie, qu'est-ce qu'on s'ennuie !" me dit une voix amie récemment.
Qu'espérais-tu ma douce Emma ? Des roses sans épine offertes chaque jour, des sensations sublimes , du soleil en rafale, que quotidiennement le cœur s'emballe ?
Ne pas se contenter du train-train, préférer le TGV. Et s'il faut renoncer au tout, choisir le rien pour ne pas vivre à moitié. La tiédeur exaspère. Un thé tiède , l'allitération est laide et la dégustation peu concluante. Brûlant ou glacé, il serait plus excitant, ferait battre le palpitant.
Mais une chaleur excessive brûle les papilles, ôtant ainsi toute possibilité de goûter à d'autres saveurs. Le trop emprisonne, rend servile et le trop peu tend vers le néant.
Pourquoi ne pas alors explorer ce juste milieu sans pour autant s'accommoder d'une langueur tiédasse.
Coudre bout à bout tous les petits bouts, un patchwork d'événements insignifiants, une mosaïque d'instants.
Contempler d'un sommet cette œuvre d'art unique, d'une unique vie parmi des milliards.
Du rien au tout, des montagnes de l'Oural aux mornes plaines, ce sont finalement tous ces petits bouts qui feront battre le palpitant puisque de toute façon nous ne naviguons, marchons, courons ou volons que d'un néant à l'autre et nous sommes de nos vies le seul apôtre (cette dernière partie ne signifie rien mais j'ai un TOC, je ne peux m'empêcher de rimer et les parenthèses me manquaient, d'une pierre deux coups et des mots pour ne rien dire du tout) (quand le langage ne veut rien dire du tout, il a une fonction phatique, uniquement utilisé pour établir une communication, mais ce sera un autre billet sinon ce sera trop long)

Dans Mars 2021

Potiche !

Par Le 11/03/2021

J'ai revu l'écureuil
L'écureuil dans son pin
Aux heures du petit matin
La pie guettait l'oeil en coin
Le chat sournois se lèchait les babines
Cours petit écureuil
Va cueillir quelques pignes
Puis reviens à l'abri
Du chat et de la pie
Goûte aux pignons
Avec passion
Délecte-toi de ce doux printemps
Mais méfie-toi des prédateurs
Aux dents longues
Tu n'es pas né dans un jardin d'Eden
Tu es né dans la jongle
Méfie-toi de leurs regards enjôleurs
Ils ne songent qu'à t'arracher le coeur
Prends soin de toi
Sinon personne ne le fera
Je veux continuer à te voir gambader
Je veux admirer ton panache
Observer ton cache-cache
Et faire des rimes riches
Je ne suis pourtant pas une potiche !

Dans Mars 2021

La complainte de Carrie Adam

Par Le 10/03/2021

Un jour la petite souris m'a dit
Brosse toi bien les dents
Tu n'auras pas de carie
Quand tes premières quenottes
Attraperont la tremblote
Je viendrai au milieu de la nuit
Déposer une pièce et peut-être un secret
Dans le creux de ton oreiller

Aujourd'hui j'affiche un beau sourire
Oubliées les risettes de bébé
Les moqueries des cours de récré
Les dents d'acier à l'âge ingrat
Les mercredis chez le dentiste
Pas de chance pas sur la bonne liste
Puis en soignant ses racines attendre avec sagesse
Des défenses incisives pour panser ses faiblesses


La petite souris se rappelle parfois à mon souvenir
Ne mange pas trop de sucrerie
Mais croque la vie à pleines dents
Il ne dure pas si longtemps
Ce joli sourire sur les lèvres
Pense à faire fructifier les pièces sur sous l'oreiller
Un jour tu seras vieille édentée
Avec tes économies tu pourras t'offrir un beau dentier !

Dans Mars 2021

Point virgule

Par Le 09/03/2021

J'ai décidé à l'unanimité avec mes mois, sans trop d'émoi de ne plus mettre de point final à mes billets. Pourquoi ? Pourquoi  pas ? Une fantaisie symbolique. La plupart du temps, ils ne sont pas finis, ils pourraient être un commencement, s'inscrire dans un continuum ad libitum. Le point final est radical, l'idée initiale parfois radicule bien que souvent ridicule. Pourtant des points il en faut ! Oui mais point trop.
Quand l'idée a germé, pourquoi ne pas la laisser s'épanouir, grandir, lui offrir la possibilité d'atteindre des sommets ? Mettre un point d'orgue, arriver au paroxysme de sa pensée.
Rien ne dure, tout recommence. Du mythe de l'éternel retour à celui de Sisyphe, apparaît l'absurdité de la condition humaine. Ainsi demain, j'écrirai un autre billet, aussi insignifiant que les précédents. Je l'écrirai quand même pour inventer un sens, encore un mot aux multiples définitions, de la signification à la direction. Un axe pour trouver une vaine explication à la marche du monde. Pourquoi tout plutôt que rien ? Pourquoi un point ou point ? Pourquoi une propension agaçante à la rime dans ma prose ? Par quelle opération le phénix renaît-il de ses cendres. Bois lourd, cendre légère (non je ne suis pas devenue sage chaman indien). Le feu ne renaît pas forcément au matin.
Heureusement, Dieu gît dans les détails

Dans Mars 2021

Joyeuse Anne e.versaire

Par Le 08/03/2021

Il est arrivé ce jour qu'on n'aurait su imaginer dans notre folle jeunesse, cette dizaine censée annoncer un tournant. Mais tu habites à la bonne adresse, une longue avenue, la vue est dégagée et le ciel est clément.
De ces années adolescentes, nous avons su en apaiser les tourments. Il est quand même des avantages à devenir grand !
Apprécier la lumière de l'instant, la senteur du "Blue moon" parce que c'est rafraîchissant, savoir que "provisoirement ça veut dire pas tout le temps", mais que d'autres choses durent longtemps, que Chloé ne rime pas avec nénuphar, qu'il est toujours un phare éclairé au milieu des nuits les plus noires, que "tomorrow is another day"
, que malgré les tempêtes et les ciels enflammés Tara résistera et que Scarlett O'Hara...
Le nombre peut résonner comme une grosse caisse, un roulement de tambour, il sonne lourd dans l'inconscient collectif. Pourtant ce n'est pas un récif où le bateau pourrait s'échouer, c'est au contraire la promesse d'une suite de voyage sans ambages.
Les printemps passés, les écueils des saisons antérieures n'auront pu effacer ton sourire enchanteur, ton humeur badine, ton regard pétillant et malicieux sur le monde et les gens.
Continue à nager, petit poisson dans les eaux sereines des courants qui te sont chers, de l'Aude à la Seine, des cascades enjouées aux rivières souterraines, des rivages océaniques aux côtes méditerranéennes. Et pour t'évader, tu vas parfois promener tes pensées sur les rivages de la mer de la Tranquillité, je le sais je t'y ai croisée...
Les cinquante balais ne te serviront qu'à déblayer ces quelques feuilles mortes qui s'immiscent subrepticement sous les portes, et les éventuelles traces sur ton joli minois dans le miroir ne seront qu'illusoires, "l'essentiel est invisible pour les yeux..." et nous c'est sûr nous ne serons jamais vieux ! (ni mâles non plus mais fallait que ça rime un peu!)
Pour célébrer cette sortie de quarantaine (illusoire elle aussi à cause d'un virus, un minus surexcité), un petit billet comme un poème... rêve, vis, aime...

 

A très vite, je te rejoins bientôt , je suis déjà sur l'embarcadère, en route pour cette autre moitié séculaire !

Dans Mars 2021

A vol d'oiseau

Par Le 07/03/2021

C'était plutôt clair pour une couleur sombre, une sorte de halo dans la pénombre ?
Mais alors que je m'apprêtais à divaguer sur les nuances de l'ombre, je tombai (sans déplorer la moindre plaie) sur un mot guilleret, inconnu à mon vocabulaire: guillemot, sans guillemet vous vous en doutez. Nom vernaculaire, me renseigna Robert, oiseau palmipède voisin du pingouin.
C'est bien, il n'est pas tout seul, s'il a faim, il peut aller crier "j'ai faim"  chez le pingouin son voisin, porte de gauche sur son palier. Là arrivent les guillemets à point nommé. Le pingouin est un fin gourmet prêt à pallier par de succulents mets l'appétit de son voisin.
Ils vont ensuite danser tout l'été la polka du côté de l'Alaska.
Ne me départant pas cependant de ma première idée, j'étudiai plus en détail la couleur de ses plumes, et j'appris que son dos et ses ailes étaient d'un brun foncé, donc un noir clair. Je savais bien que je trouverais un point commun entre les deux histoires. Toujours en quête d'un savoir universel (non je n'ai pas peur des mots), je découvris que Maupassant, Guy de son prénom, avait écrit une nouvelle intitulée "La roche aux guillemots". Pourquoi donc n'ai-je pas connu plus tôt ce nom d'oiseau ? (J'en ai pourtant rencontrés de toutes sortes).
Et de me plonger dans la Vie tourmentée de ce pauvre Maupassant. L'avais-je su, l'avais-je oublié ? C'était le pote à Flaubert. Il ne se remit jamais de sa mort et écrivit, deux points, ouvrez les guillemets : "Je sens en ce moment d'une façon aiguë l'inutilité de vivre, la stérilité de tout effort, la hideuse monotonie des évènements et des choses et cet isolement moral dans lequel nous vivons tous, mais dont je souffrais moins quand je pouvais causer avec lui."
C'est noir sans aucun espoir de clarté, point d'oxymoron dans l'énoncé, juste matière à se faire du mouron. N'étant pas aujourd'hui d'une joyeuse humeur morbide, je laisserai reposer en paix ces braves Guy et Gustave, et irai plutôt faire une balade avec une tendre amie, puisque désormais Emma Bovarit.

Dans Mars 2021

Chloé anaphore

Par Le 06/03/2021

Que devient Chloé* en ces temps pseudo confinés ? Je l'ai un peu perdue de vue ces dernières années. Parvient-elle à garder sa légèreté dans cette liberté barbelée ? Comment s'arrange-t-elle d'un quotidien restreint ?

Chloé tous les jours
Malgré les années
Vit un grand amour
Réel ou rêvé
Sur sa balançoire
Ecrit des histoires
Pour le raconter
Chloé pétale de rose
En poésie en prose
Chloé perle de rosée
Aux premières clartés
Se gorge de l'instant
Edulcore son ignorance
Et chante dans le vent
Un soupçon d'insouciance
Chloé frivole
Revient dans la danse
Une époque folle
Le monde a changé
Il s'est barbelé
Drôles d'incidences
Chloé en silence
Contourne les barrières
S'envole dans les airs
Un oiseau sans cage
Chloé n'est pas sage


* Chloé antérieure dans la rubrique Chloeserie

 

Dans Mars 2021

Anamnèse

Par Le 05/03/2021

Je me confonds dilemme et indemne dans le positionnement du M et du N, lequel en prend deux , lequel ne prend qu'un M suivi d'un N. J'ignore par ailleurs la pronominalité et la transitivité, me perds parfois en translation dans les lignes du dictionnaire. Faut-il alors se taire ou se terrer , jouer de son altérité ?
Un dilemme avec deux M, un thème à aborder avec son alter ego ? Un drôle deux mots, que Robert définit (accord sylleptique) outre "un autre moi" par "bras droit". Je suis très satisafaite du mien, je n'en veux pas un autre. Mon moi est parfois défaillant mais depuis le temps que nous nous fréquentons, j'ai appris à faire avec ce qu'il était et sans ce qu'il n'est pas. A l'automne de nos vies, nos histoires sont-elles condamnées à l'oubli, à l'amnésie ?
Il n'est pas toujours facile de sortir indemne d'une relation à deux, pourtant qu'y a-t-il de plus savoureux que la caresse d'un regard amoureux ? Il y aurait bien ce verre de vin mais quel intérêt s'il ne trinque pas avec le tien.
Mon billet va sentir le réchauffé, le M et le N j'en ai déjà parlé et minuit a sonné alors que je m'étais mollement laissée aller dans les bras de Morphée, une somnolence entre deux insomnies. J'en suis ressortie indemne, et là pas de dilemme, je vais me coucher !

Dans Mars 2021

Gaubergine

Par Le 04/03/2021

Se goberger signifie-t-il se gaver d'aubergines sur canapé ? Une gabegie d'aubergines ? Mais ce n'est pas la saison. Il faut se contenter de carotter quelques carottes sur le marché. Les temps sont durs pour les rêveurs et la période tellement propice à l'absurdité, pourquoi ne pas se goberger d'aubergines, au lieu de poireauter bettement* en espérant des jours meilleurs. Au risque de faire chou blanc en racontant des salades, je préfère me fendre la poire avec des significations illusoires. Même si ce que j'écris compte pour des prunes, mon coeur d'artichaut ne se lasse pas de s'émouvoir d'un bon mot. Un soupçon de piment pour relever le plat, lui donner du relief, oublier ses griefs et dans une rime entrevoir une madeleine. Un cratère de purée garni d'un jus léger, dix centimètres de dénivelé. Je voudrais bien emprunter l'autre courbe du temps et revenir dans ce jardin d'antan, un espace protégé où j'étais traitée aux petits oignons, un cocon, quand j'étais haute comme trois pommes. Puis j'ai poussé comme un champignon, suis devenue asperge avant de finir princesse avec un petit pois sous son matelas. Maintenant que les carottes sont cuites, je me retrouve courgette dans une tambouille de mots, une ratatouille lexicale. Je suis mi-figue, mi-raisin, je peine à différencier le bien du mal. Ce que je sais c'est qu'à minuit, Cendrillon ne se transforme pas en potiron, son carrosse si, j'ai découvert le pot aux roses récemment.
Avant de manger les pissenlits par les racines, je veux croquer les pommes à pleines dents sans y tomber dedans.
Et tant que mon pois chiche s'agitera frénétiquement dans son bocal, je me gobergerai d'aubergines, écrirai des lignes bancales et détournerai les mots en attendant la fin des haricots

Dans Mars 2021

Mauvais oeil

Par Le 03/03/2021

Ne croire en rien, c'est déjà croire en quelque chose. Croire que rien n'est déterminé, que tout est à inventer.
Un chat noir passe sous une échelle, une salière renversée sur un pain retourné, une table de treize convives face à un miroir brisé. Laissez-moi toucher du bois pour me protéger de tous ces sortilèges.
Pourquoi une entité supérieure s'intéresserait à nos pauvres carcasses de mammifères ? Pourquoi un sombre félin et quelques grains de sel feraient notre malheur alors qu'un trèfle à quatre feuilles ou un fer à cheval nous redonneraient chance et félicité?
Et si tout était écrit où seraient consignées nos destinées ? Dans un netflix universel, une plateforme de séries VOD en illimité.
Les dieux sont devenus addict aux écrans, ils s'adonnent au binge-watching sans complexe, négligeant même les saints textes. Leur dernière folie, une super production originale, la propagation d'un virus international. Ils s'en donnent à coeur joie, se tapent sur les cuisses en contemplant le zbeul qu'ils ont créé.
Quant à moi, à force de blasphémer, je finirai sur le bûcher, à me consumer comme un bâton d'encens. Telle est sûrement ma destinée

  • 50
  • 51
  • 52
  • 53
  • 54
  • 55
  • 56
  • 57