Articles de barbaraburgos

Dans 2020

Atelier écriture 2

Par Le 29/04/2020

Cite lune

Choisir une image d'un paysage, décrire ce que l'on voit de la fenêtre de l'endoit où l'on se trouve. Ecrire ensuite le texte en éludant une voyelle au choix (lipogramme)

 

 

Mon cher Viktor,

 

Je vous écris du milieu de la nuit, depuis cette chambre austère où j'ai malencontreusement échoué, dans une ville étrangère aux allures médiévales.

Tout avait pourtant bien commencé. Les tableaux étaient parvenus à destination sans encombre, les formulaires dûment estampillés par les sbires de l'Autorité, l'organisation pour une fois était parfaite, jusqu'à...

Oh Viktor, ce que je vois depuis la fenêtre de mon taudis me saisis d'une vive émotion. Le ciel vient de se dévoiler et laisse apparaître un disque lumineux aux dimensions irréelles. Je suis aimantée par tant de splendeur. Comme je voudrais partager cet instant avec vous, vous que je n'ai fait qu'effleurer et qui pourtant emplissait chacune de mes pensées.

Viktor, cet énorme ballon dans le ciel déchiré de nuages noirs semble vouloir éclairer notre ignorance et nos graves manquements à l'égard de la planète dont nous sommes locataires. Le spectacle est saisissant. Les vieilles pierres, imposantes, intactes depuis des millénaires apportent une solennité, une puissance surnaturelle à l'ensemble du tableau. Les flèches des toits d'ardoise semblent transpercer les nuages.Je tremble de tant de grâce. Je voudrais sortir, respirer l'air autrefois si pur, courir sur ce chemin pavé, courir pour rattraper le temps, courir à en perdre mon souffle et enfin vous apercevoir dans la lumière de cet étrange phénomène.

Je ne sais quel sera notre avenir, si seulement nous en aurons un mais je veux espérer qu'il soit avec vous et qu'il nous soit donné d'avoir chaque jour une aussi belle représentation de la beauté.

Viktor, une révolution se prépare, j'ai peur, je suis seule et vous êtes si loin. L'Autorité m'a confisqué mon phonephoto, je ne peux ni vous contacter ni figer cette vision. On me prendrait pour une folle si j'en parlais à quiconque, vous seul pourriez me croire.

Je vais tenter de contourner le système et d'envoyer cette missive par les canaux secrets. Venez me chercher, vous êtes mon seul espoir.

 

Svetlana

 

 

Lipogramme en I

 

Mon cher Vyctor,

 

Je m'épanche auprès de vous du plus profond des ténèbres, une chambre austère, malencontreux refuge dans un bourg aux allures moyenâgeuses.

Tout fut excellent dès le départ: tableaux parvenus à bon port sans encombre, accords frappés du sceau de la Royauté, plan exécuté sans lacune, jusqu'à...

Vyctor, je regarde par la fenêtre de ma mansarde et le spectacle me tourmente fortement. Dans la voûte céleste se découpe un énorme cercle jaune surnaturel. Ah, vous espérer à mes côtés et partager ce moment avec vous, vous dans la souvenance d'un effleurement, dans mes pensées à chaque seconde.

Vyctor, cet énorme ballon au centre d'une sombre atmosphère semble nous montrer nos graves manquements, nos erreurs à l'égard de la planète dont nous sommes les hôtes pour un temps donné. Le spectacle est fabuleux. Les murs ancestraux, solennels apportent une force au tableau, comme une vue de l'au-delà. Les flèches des tours semblent transpercer les nuages. Je tremble de tant de grâce. Je veux m'élancer sur les pavés, gonfler mes poumons d'oxygène naguère d'une pureté absolue, avancer à toute allure pour rattraper le temps, perdre mon souffle et vous penser présent, là debout dans la clarté de cet étrange phénomène.

Quel sera notre futur, en aurons-nous un ? Je veux l’espérer avec vous pour contempler une telle beauté chaque jour.

Vyctor, un bouleversement se prépare, la peur me submerge, votre absence est lourde à porter.

La Royauté m'a volé mon phonephoto, je ne peux vous contacter ou garder une preuve de ce panorama. Pourvu qu'on ne me prenne pas pour une folle, vous vous serez persuadé du fondement de mes propos, n'est-ce-pas ?

Je tente de contourner le système et d'envoyer cette lettre par les canaux secrets.

Venez me chercher, vous êtes ma seule espérance.

 

Svetlana

 

 

 

 

 

Dans 2020

Atelier écriture 3

Par Le 29/04/2020

Consigne de l'atelier d'écriture: décrivez le vol d'une oeuvre d'art que vous aimeriez avoir chez vous

 

 

-Marcel, ça y est tu peux sortir, ils sont tous partis. Y'a plus que nous maintenant, nous et eux, là quelques mètres au-dessus. Tu te rends comptes Marcel: on y est, on est là où je rêvais d'être depuis toutes ces années. Je t'ai déjà raconté ma première rencontre avec eux?

-Oui un demi-million de fois au moins. T'étais avec ta marraine, une femme douce et généreuse autant que ta mère était avare et revêche...

-Oui c'est ça Marcel, si tu l'avais connu, quand elle me donnait la main j'avais l'impression de caresser un nuage

-Bon Georges je sais que tu es un poète mais tu crois pas qu'on a du pain sur la planche

-Si bien sûr, on y va, tiens attrape les piolets, les cordes et le laser, t'as bien repéré tous les points d'ancrage

-Ouais c'est nickel j'ai mis mes lunettes infrarouge, c'est parti mon kiki, je t'ouvre la voie 

-Si Mamita me voyait, je crois qu'elle serait fière de moi, son rêve le plus secret aurait été de vivre au milieu d'eux. Tu sais qu'elle venait tous les dimanches leur rendre visite, ils étaient sa vie, sa famille, ses amis. Ils la consolait de la médiocrité et de la laideur de son existence

-On a une œuvre de 200 mètres carré à faire s'évaporer dans la nature et Monsieur cause philosophie, tiens je te lance la corde, double nœud et fais rouler Simone, ascension jusqu'au 7ème ciel. Mouvements légers, précis, pas de gestes brusques, tu deviens un félin prêt à bondir sur sa proie, prestance et célérité !

-T'en connais des mots mon Marcello.Mais t'inquiète pas ça fait 7826 jours que je m'entraîne, je peux refaire ce parcours les yeux fermés dans le noir absolu

-Allez plus que 2 mètres.Waouh ! Waouh ! Non mais tu vois ça mon Marcel

-Hé y serait aveugle si y voyait pas !

-Presque je remettrais en question la non existence de Dieu

-Et y recommence à philosopher, tiens prends plutôt le découpeur laser, il vaudrait mieux ne pas traîner ici trop longtemps

-Tu as raison. Je sens que la main de Mamita me guide et veille sur moi, je ne tremble même pas. Oh regarde ces couleurs et ces formes informes. Par ici les petits, je vais pouvoir passer le restant de mes jours à plonger mon regard dans vos reflets sombres et envoûtants

-Georges, fais gaffe t'as failli décrocher, bon sang concentre toi, j'ai pas envie de retourner au trou moi

-Moi non plus mais ton plan est tellement parfait, t'es un génie mon Marcel

-Bon maintenant, je déclenche l'alarme incendie, tu as 6 minutes pour te changer, rouler les toiles dans les tuyaux et cacher tout le matériel.

 

Une du Parisien mercredi 1er Avril, cambriolage spectaculaire au musée de l'Orangerie, un gang de malfaiteurs s'est emparé de la pièce maîtresse de la collection , Les Nymphéas de Monet, chef d'œuvre de l'impressionnisme d'une valeur inestimable aux dimensions extraordinaires. Selon la police, seul le crime organisé peut être à l'origine d' un cambriolage d'une telle envergure.

 

Un peu plus loin en banlieue :

-Je suis heureux Marcel

-Moi aussi Georges, le petit Picasso que j'ai pris au passage va m'assurer une retraite confortable

 

 

 

 

 

 

Dans 2020

Atelier d'écriture

Par Le 24/03/2020

J'ai participé à un atelier d'écriture en ligne, voilà les consignes et le résultat :


Je vous propose un logorallye
✍️Ce petit jeu consiste à écrire en introduisant dans le texte les mots d'une liste établie.
Je vous invite donc à écrire un texte qui commencera par la phrase suivante :
«Ils avaient annoncé des orages pour la fin de la journée, mais le ciel restait bleu et le vent était tombé»
et se terminera pas la phrase suivante :
«Il avait un air de bout du monde cet homme-là».
Entre les deux, vous devrez donc introduire à votre texte les 10 mots suivants dans l’ordre que vous voudrez (et merci pour vos suggestions!) :
Coquelicot / Prévision / Poisson rouge / Meurtrier / Éplucher / Big Bang / Missive / Sabre-laser / Métissé / Rafistoler
Les noms et adjectifs peuvent être mis au féminin ou au pluriel selon ce qui vous arrange, et les verbes pourront être conjugués.
 

Ils avaient annoncé des orages pour la fin de la journée, mais le ciel restait bleu et le vent était tombé. Cependant l'air devenait lourd et l'ambiance pesante. Marianne flânait dans le jardin, elle errait entre les doutes et la certitude que sa journée à l'image de sa vie serait un gâchis. Elle ne faisait et ne ressentait rien à moitié. Si elle s'ennuyait une heure, son existence entière était vouée à l'échec. Et puis c'était dimanche, elle détestait les dimanches. Tous sans exception. Même si elle avait passé un bon moment, l'évocation de ce jour finissait par anéantir son plaisir.

Un poisson rouge tournoyait dans la mare. « C'est tout moi ça » pensa-t-elle, «  je tourne en rond, je tourne en rond et je ne fais jamais rien de bon. Quel est le but ? Pourquoi le Big Bang, pourquoi ce coquelicot est-il rouge ? Il aurait pu être bleu ou vert. Non, dans coquelicot on devine le rouge. « Bien sûr parce qu'on est conditionné » sa petite voix lui parlait souvent, elle peinait à la faire taire. « Je maintiens que le mot coquelicot implique une notion de rouge,la structure du mot, sa musicalité, le rouge précède le coquelicot comme l'existence précède l'essence» Bon là elle n'était plus très sûre. Elle aimait élaborer des théories oiseuses sur tout et son contraire, construire des phrases alambiquées dont elle oubliait la signification. Elle sourit. Une bonne dose d'autodérision lui évitait finalement de sombrer dans le désespoir «  il faut imaginer Sisyphe heureux, on ne peut qu'imaginer un coquelicot rouge, CQFD. »

« Mais tu ne démontres rien du tout, tu débloques complètement ma pauvre fille »

« Chut ! » elle fit taire sa petite voix et continua sa déambulation. Elle salua son voisin qui s'entraînait intensivement pour le championnat du monde de sabre-laser, une nouvelle discipline, un sport métissé entre escrime et arts martiaux. Il lui répondit d'un hochement de tête. Elle eût envie d'entamer une conversation, un sentiment de solitude aigu s'abattit sur elle.

« Depuis combien de temps je n'ai pas parlé à un autre humain ? » Pour une fois sa petite voix se fit discrète. Elle s'arrêta sous le pin parasol et s'assit sur le vieux banc en bois rafistolé. Elle y avait oublié le journal de la veille. Elle le déplia machinalement. Elle se rappela sa grand-mère qui épluchait la rubrique nécrologique tous les matins. L'été avait été meurtrier et la liste était encore longue aujourd'hui. Dans une missive adressée à ses administrés,le chef du canton incitait à la prudence.

« Ce journal m'ennuie et me déprime, même les prévisions météo sont fausses, je vais résilier mon abonnement ». Elle observa son voisin attentivement. Il fendait l'air avec agilité dans sa panoplie de samouraï futuriste. Il était de taille moyenne,1m 72 environ, cheveux noirs et raides, yeux bridés, il avait réussi à fuir son pays avant la date fatidique. Il avait un air de bout du monde cet homme-là.

Dans 2018

Du coq à l'âne

Par Le 19/03/2020

Parfois quand les heures s'enlisent du côté des zones de congélation éternelle, que les aiguilles dégoulinent d'une sirupeuse lassitude, je me surprends à relire les mots semés au fil des ans. Traces d'un passage dans cet intervalle espace-temps. Depuis la nuit des temps les hommes laissent des traces de leur passage.
Ces mots ensemencés sont restés stériles, ils n'ont pas poussé, ne se sont pas surpassés, n'ont produit aucun fruit, aucune fleur. Au mieux ils m'ont permis de continuer à dérouler les feuilles du calendrier, éphéméride absurde pour aller d'un point A à un point B. Se lever le matin, se coucher le soir, un lieu commun, entre espoir, errance, désespérance.
On ne sème plus de mots. On ne s'aime plus. Un silence de tombeau dans les coeurs solitaires, le vide jusqu'au plus profond des os. Regard creux sur le monde qui bouge. Les mots ne coulent plus de source, elle est tarie, trahie. Qui a inventé les mots? Un sourcier sorcier ?
Association d'idées, un lac, une montagne en d'autres temps. Le passé est mort, enterré, une stèle pour devoir de mémoire mais les fleurs ne poussent plus au jardin du souvenir. Ils avaient entre 17 et 30 ans, l'épitaphe est violent "sauvagemment assassinés par les boches". Cela n'a rien à voir avec mon propos initial, juste une hyperconnexion de mes cellules gliales (dont j'ai appris récemment que l'on sous-estimait leur rôle ). Mais d'où vient l'expression passer du coq à l'âne?

Dans 2020

Les illusions perdues

Par Le 17/03/2020

Je viens d'avoir une fausse joie, j'ai vu clignoter la rubrique messagerie de mon site depuis longtemps désertés (mon site et sa messagerie). Je me suis dit qu'un autre humain avait lu mes écrits, s'y était suffisamment attardé pour éprouver l'envie de laisser un commentaire, d'émettre un avis, de m'envoyer un petit mot doux. Point du tout. C'était un message par robot généré !!! Bouh, je fus triste tout d'un coup. Moi qui pensais pouvoir communiquer avec toi lecteur mon semblable, mon frère, qu'elle ne fut pas ma déception!Pas le moindre petit mot à se mettre sous la dent. Alors ceux des autres (de mots) quand il fait sommeil dans les chaumières et que demain il faut se lever tôt malgré le confinement pour aller au boulot. A très bientôt

Charles BAUDELAIRE 1821 - 1867        Au lecteur

La sottise, l'erreur, le péché, la lésine,
Occupent nos esprits et travaillent nos corps,
Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.

Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ;
Nous nous faisons payer grassement nos aveux,
Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,
Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches.

Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !
Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.

Ainsi qu'un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d'une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

Serré, fourmillant, comme un million d'helminthes,
Dans nos cerveaux ribote un peuple de Démons,
Et, quand nous respirons,
la Mort dans nos poumons

Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.
Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie,
N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins
Le canevas banal de nos piteux destins,

C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie.
Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,

Dans la ménagerie infâme de nos vices,
Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !
Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,
Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde ;

C'est l'Ennui ! - l'oeil chargé d'un pleur involontaire,
Il rêve d'échafauds en fumant son houka.
Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat, -
Hypocrite lecteur, - mon semblable, - mon frère !

Dans 2020

On ira tous au paradis

Par Le 16/03/2020

Premier jour de confinement, enfin presque. Ce matin je suis allée voter, acheter du pain et chercher le poulet rôti commandé la veille à la supérette du village. Il a fait des envieux, des clients qui revenaient bredouilles de l'hypermarché le plus proche, ils lorgnaient sur mon poulet, les yeux exorbités, la langue pendante comme le loup de Tex Avery devant une pin-up. Faut dire que je l'avais choisi sans grippe aviaire, j'avais aussi pris du lait de vache pas folle du tout, de la salade sans pesticide, des radis sans OGM. De quoi nourrir les asticots avec du bon et du bio quand la cloche sonnera. Drelin drelin, départ du dernier train, ah on a encore droit aux transports en commun, oui oui en plus pour le paradis c'est gratuit. C'est la moindre des choses, mais alors ça veut dire que je vais au paradis, comment ça se fait je crois en rien ? Ben c'est Lui qui l'a décidé. Mais Lui il n'existe pas, je sais c'est Lui même qui me l'a dit. Il m'est apparu un soir et il m'a dit cela fait 2000 ans que des humains croient en moi, je ne sais pas pourquoi parce que je n'existe pas, je ne suis qu'une légende. J'étais bien embêtée quand il m'a fait ces révélations, moi j'en étais déjà convaincue, les autres ne m'ont pas crue. Donc j'irais au paradis, et faut vivre une éternité là-haut ? Parce que vraiment le temps imparti ici-bas moi ça me suffit, le paradis , avec que des gentils, pas sûr que ça me corresponde, j'ai eu ma période Petite Maison dans la Prairie mais maintenant je préfère les Sons of Anarchy. La famille Ingalls pour l'éternité, quel enfer ! Et si on connaissait la date de sortie, que ferait-on du sursis ? Je crois que je ne changerais finalement pas grand chose. Peut-être que je me remettrais à fumer, juste pour le plaisir d'entendre la cigarette se consumer, ce discret crépitement seulement perceptible dans le silence et dans le noir. J'écrirais davantage, je finirais mes collages puis je ferais du ménage, j'aime bien laisser la maison propre avant de partir. Ensuite pas de tralala, une boite en carton recyclé, bien évidemment pas de curé, quelques poésies, deux trois chansons et fin de la plaisanterie.C'est comme ça, la mort fait partie de la vie.

Dans 2020

Walkman et coïncidence

Par Le 08/03/2020

Ecran blanc. Il faut le nourrir tous les jours, trouver un thème, choisir les mots, en dire un peu mais pas trop.
Hier soir, de la musique et des mots, des vibrations, des émotions, des souvenirs adolescents, des cassettes rembobinées. Combien de temps. Toujours la même question. En ce temps là, je pensais avoir le temps. Je croyais en la destinée. Dans le walkman la bande son s'est déroulée, vitesse normale ou accélérée puis le bouton rewind s'est détraqué, la bande a vrillé. Walkman, cassettes et destinée obsolètes. Rien n'était écrit. Le livre de la vie se raconte au jour le jour. Il y a des hasards, des rencontres, des coïncidences.  Digression: le i tréma est une lettre curieuse, il ne veut pas se mélanger à ses consoeurs les consonnes, il reste libre, indépendant. Pour coïncidence par exemple cela donnerait coincidence, on imagine (du moins je) une pièce carrée avec dans un coin un canard jaune en plastique qui ferait écho à un ciré et des bottes de pluie d'une couleur similaire disposés dans le coin opposé, on se dirait tiens quelle coincidence, c'est jaune, c'est pour aller au bord de l'eau, et on repartirait heureux en pensant que la vie est bien faite. Fin de la digression, aussi superfétatoire qu'inepte.
Donc hier soir, théâtre comble, des musiciens en chair et en os jouant de vrais instruments, un chanteur suisse immigré amoureux de Carcassonne, des inconnus assis dans des fauteuils rouges et dans un coin une coïncidence. Une étrange histoire, une mère et son fils que je croise régulièrement dans des lieux culturels depuis plus de 15 ans. La 1ère fois c'était en mai 2004 à un concert de Cali au théâtre de Montauban, soit à 200 km de chez moi. Cette dame était dans la salle avec son fils de 18 mois environ (âge de mon fils à cette époque), ils se remarquaient tous les deux car la soirée n'était pas adaptée à un enfant de cet âge. J'ai eu la surprise de les revoir régulièrement à Carcassonne sans jamais leur parler. Puis un jour de pluie, en allant assister au vernissage d'une exposition à Montolieu, je m'arrête pour prendre des autostoppeurs, surprise Madame X et son fils ! Je ne leur ai pas dit que je me souvenais de cette 1ère rencontre 15 ans plus tôt. J'ai juste dû réfréné un fou rire qui s'était invité en réponse à cette coincidence. Peu de temps après, ils m'ont interpelée lors d'une autre exposition pour que je les ramène chez eux. Cette mère a l'air d'être seule et sans trop de ressource, mais semble vouloir offrir à son fils une culture artistique, des images de belles choses, des expériences qui ne coûtent rien, qui d'ailleurs ne s'achètent pas. Cette mère et son fils me touchent. Je n'ai pas osé aller leur parler hier soir. J'ai vu Madame sortir 2 billets de 10 euros en échange des places achetées à un particulier, au 3ème balcon sûrement. Et j'ai eu honte. Honte de moi avec mes invitations, honte de toutes les places réservées aux élus et notables qui restent vides. Mais Miss France n'a pas encore réussi à rétablir la paix dans le monde ni à gommer toutes les injustices. Puis cela ne m'a quand même pas empêchée de profiter du concert. J'espère qu'ils ont eux aussi passé une bonne soirée. La prochaine fois, j'irai leur parler.
 

Dans 2020

A votre guise

Par Le 07/03/2020

C'est un lieu commun de dire et de redire que le temps passe. Le début de ma phrase est déjà du passé, un temps qui ne reviendra pas, le point final est du futur à présent, mais une fois ce futur atteint, il deviendra passé. Le présent existe-t-il vraiment ? Il dure le temps d'une inspiration, à l'expiration l'air appartient au passé.
Le défi de ce blog était au départ d'écrire un billet chaque jour. Les bonnes résolutions se sont perdues dans le tourbillon de la vie. Plus de 9 années ont ou sont passées. Des traversées du désert, des éclaircies, des catastrophes naturelles, des longs fleuves tranquilles, une succession aléatoire d'événements non définis par un être supérieur ou l'influence de quelconques planètes. Juste un fil qui se déroule, auquel on veut chercher un sens, une signification profonde. Il est difficile de se résoudre à l'absurdité de la queston existentielle. Alors on remet son destin dans les mains de dieux inconnus, dans la reconnaissance de signes transcendantaux. Il est réconfortant de penser qu'en faisant brûler une bougie on aidera les bonnes âmes à atteindre le paradis. Qu'avec 2 pater 3 ave, un allah akbar, un rite vaudou , une communion, une circoncision, une bar-mitsva, un mandala ou dieu sait quoi encore on s'attirera les faveurs du tout puissant ou des forces bienfaitrices...pourquoi ?
Pourquoi ceux qui tentent de flotter sur une planche en Méditerranée gardent-ils la foi ? Pourquoi et comment trouvent-ils la force d'avancer ?
Moi une simple enveloppe estampillée "trésor public" me donne envie de creuser un terrier et de m'y enfoncer en attendant des jours meilleurs.
Bref aucun rapport, aucun lien de cause à effet. Chacun fait comme il peut, avec Allah, Bouddha, Jésus, Jéhovah, Google, Amazon, Ikéa. L'essentiel est de se distraire , de ne pas ressentir l'écrasante absence de signification de notre passage sur ce caillou en perdition. Comme je n'ai pas tous les mots et le talent pour expliquer ce que je ressens, j'emprunte ceux des autres, et pas n'importe qui

Enivrez-vous


    Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.

    Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.

    Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : « Il est l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. »

Charles Baudelaire - Le Spleen de Paris, XXXIII

Dans 2019

Tique tac

Par Le 03/09/2019

Ce serait sympathique
De se faire piquer par une tique
Ou peut-être par un moustique
En faisant de la balançoire
Sous un portique un soir
Le tic-tac de la pendule
Annoncerait le crépuscule
Elles peuvent paraître ridicules
Ces petites bêtes
Ces insectes
Ces êtres vivants minuscules
Pourtant dans l'espace d'un instant
Par le poison qu'elles inoculent
Elles peuvent faire basculer la vie
Du pauvre rêveur alangui
Du flâneur de la prairie
Tic-tac la pendule sonne le glas
Ce n'était qu'une petite tique
Une piqûre de moustique
Somme nous peu de chose ici-bas

Dans 2019

CQFD

Par Le 03/09/2019

Une addition d'addictions donne une somme bizarre, un produit étrange si c'est une multiplication.
Souvent au carré car une addiction tourne rarement rond, sinon c'est un cercle vicieux. Le nombre Pi, s'il n'est pas le meilleur, saurait-il en tirer partie? Je doute que cela soit son rayon. Peut-être aurait-il un avis diamétralement opposé et voudrait en faire une équation. Le x resterait le facteur inconnu, sans distribution de courrier pour trouver la solution, donc une inadéquation.
Se soustraire à une addiction est un problème difficile à résoudre, malgré les théories, les théorèmes, les hypothèses obtuses comme le carré de l’hypoténuse.
Quel que soit l'angle par lequel on aborde la question, c'est un casse-tête chinois, un emboîtement de poupées russes, une auberge espagnole où chacun aurait concocté un plat à sa sauce ou en 3 dimensions. Ça ne fonctionne pas non plus, il n'y a que 2 D dans addiction.
Le poser en fraction serait aussi absurde que compter les gouttes d'un robinet qui fuit, dans ce cas on appelle un plombier et on répare le robinet. Pas si simple finalement, allez donc trouver un plombier honnête. Bref, une addiction par définition ne fait pas dans la demi-mesure, on n'est pas 1/3 ou ½ dépendant, la substance même de l'addiction (quelle que soit la substance) est d'être entière, totale, parfois invisible, toujours indivisible.

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