Articles de barbaraburgos
Evidence
Je me suis rendue à l'évidence, n'ayant rien trouvé, je suis revenue à pied
J'ai perdu connaissances, impossible de me rappeler toutes les leçons étudiées
Je n'y suis pas allée par quatre chemins, un seul menait à la bonne destination
Je me suis penchée sur la question, désaxée par la force d'attraction
Je suis tombée de Charybde en Scylla, dans un cri d'effraie ou d'effroi
J'ai ensuite caressé l'espoir et son fallacieux velours noir
J'ai cherché midi à quatorze heures dans un élan prometteur
J'ai tiré le diable par la queue pour m'étourdir un peu
J'ai fini par prendre une douche écossaise pour calmer le malaise
J'ai filé à l'anglaise un bien mauvais coton
J'ai pris la clé des champs, je connaissais la chanson
J'ai parlé à coeur ouvert, mon sang n'a fait qu'un tour
J'ai dû le recoudre de fil blanc au grand jour
Je me suis finalement lassée de ces supercheries
J'ai profité d'une douce pluie, un grain de folie
Et je suis partie vivre en théorie
Lagune
J'ai des lacunes
Sur la lagune
Allongée
Oubliés
Ton nom ta voix
Tes bras autour de moi
J'ai des lacunes
Du haut des dunes
Je vois
Le crépuscule
D'un feu de paille
Dans les oyats
J'ai des lacunes
Sous le clair de lune
Je ne me souviens pas
De la question
De nos émois
Et toi ?
J'ai des lacunes
Face à Neptune
Une nuit troublée
Sable mouillé
Chacun cherche
Sa chacune
Dans l'air iodé
J'ai des lacunes
Sur la lagune
Allongée...
Amilie
Nous nous sommes reconnues au milieu de tant d'autres humains perdus, hasard des jours et des routes. Mains tendues au-dessus du vide, l'été devenait aride. Une année paire, ses impératifs, ses impairs. Premières discussions dans les volutes de substances délétères, abattues mais candides, nous refaisions le monde pour qu'il nous semble plus doux, pour survivre malgré tout.
L'automne et ses feuilles mortes, l'hiver et ses flocons, des soirées mémorables autour d'un pont de pierre, des fous rires assumés au cinéma Gaumont, une production US en VF, le bruit des papiers de bonbon !
Puis des films en VO, de la danse coréenne, des airs d'accordéon, des poèmes, des fauteuils rouges au balcon, des frissons.
Des tasses de thé dans les salons, des ombres blanches dans les rayons, des coupes de champagne, des rendez-vous galants et filent les saisons.
Entre doutes et projets, nous avons poursuivi nos routes, en prenant soin de toujours les faire se croiser.
Les soirées claires d'été dans la maison de la famille, les jardins parfumés, les paniers bleus à partager, les nuits étoilées à rêver à tous les possibles.
Au rythme de nos insatisfactions, de balades téléphoniques, de coups de coeur, de déceptions, nous cultivons au quotidien ces liens tissés comme une évidence parfois plus forts que ceux donnés par la naissance.
Et nos plaintes littéraires n'auront pas été vaines, car aujourd'hui enfin Emma Bova-rit!
Belvédère
Je voudrais dormir à l'abri des belvédères
M'émerveiller de toutes les beautés de la terre
Réchauffer mes deux mains autour d'un thé fumant
En écoutant la folle musique du vent
Je voudrais rêver face aux sommets enneigés
M'abandonner à de voluptueuses pensées
Offrir mon visage au soleil automnal
En caressant du bout des doigts un idéal
Je voudrais m'alanguir sur un lit de bruyère
M'extasier de la nature et ses mystères
Sentir les parfums enivrants et sauvages
En savourant les doux fruits de ses rivages
Je m'étais assoupie sous un réverbère
Réveillée par les cris d'une pie en colère
Mon songe s'est envolé à tire-d'aile
Fut-il imaginaire ou fut-il bien réel
Somme-nous vraiment peu de chose ici-bas
Pour rester insensibles à ce panorama
Je voudrais m'endormir sur un belvédère
Et goûter de la vie ses plus tendres chimères
Souvenir
Villegailh'heart
Dimanche 16 Novembre 2008 : Villegailhenc exposait ses arts et ses artistes : Villegailh'art
Après maintes hésitations, je m’inscris à la manifestation, mais très vite je panique à l’idée de ne pas être à la hauteur. A la hauteur de quoi ? De mes espérances peut-être ? Mon nom est déjà imprimé sur le papier, je ne vais pas me débiner.
Le samedi vers 17h, je suis au rendez-vous pour installer mes « œuvres », totalement néophyte dans l’art de suspendre un quelconque tableau sur un panneau d’affichage. Je n’ai rien prévu, ni crochet, ni décoration, puis je n’ai même pas fini ce que je voulais faire, ah la la, cela s’annonce mal ! Heureusement mes voisines de stand me proposent spontanément leur aide. Ouf, je vais peut-être y arriver !
Je rentre chez moi et me remets au travail. Je ne veux pas décevoir ceux qui vont se déplacer, puis il y a le lieu. Ce n’est pas à Carcassonne, Paris, Londres, New York ou Tokyo ! C’est bien plus. C’est ici, dans le village de mon enfance, dans ce village où j’ai fait mes premiers pas, dit mes premiers mots, rencontré la poésie pour la première fois : c’était un après- midi d’automne sur le chemin de la Croix, les azeroliers et leurs mille petites pommes s’offraient à moi. Les vignes dans leur dernier manteau rouge et or de feuilles séchées me saluaient. Un vent froid venu du nord soufflait ou était-ce une brise légère ? Le ciel en camaïeu hésitait entre une tempête et une ondée passagère. Je garde en moi l’image de ce tableau mouvant et émouvant, un mélange paradoxal des quatre éléments. La terre fertile et craquelée sous mes pieds, l’air violent et doux à la fois, les feuilles incandescentes des vignes et l’eau en rafale sur mon visage émerveillé.
Et à toi, mon petit village devenu grand (tout comme moi) que vais-je offrir ?
Vais-je retranscrire cette émotion qui toujours vers toi m’a fait revenir ?
Je ne sais pas ce que je vais découvrir en osant m’exposer. Retrouverais-je mes rêves d’enfant ? Il n’est pas sage d’espérer autant !
Dimanche matin, 10h 25, je finis d’arranger mon décor.
Les premiers visiteurs arrivent, premières impressions d’inconnus, de proches, premiers échanges. Je découvre ou redécouvre certaines personnes. Je les regarde me regarder à travers mes poèmes entoilés. Je les regarde aussi s’exposer. J’observe les curieux, les gênés, les enthousiastes, les indifférents, les inconditionnels ! J’observe surtout cette assemblée « d’artistes » venus partager un moment de leur passion, de leur foi, de leur humanité.
Et miracle ! Je retrouve un bout d’azerolier sur une photo encadrée, plus loin c’est une croix au détour d’un chemin, un tableau aux couleurs de l’enfance…Des instants comme il n’en existe pas tant. Je pourrais fermer les yeux, sentir à nouveau le souffle du vent, les gouttes de pluie et l’odeur de la terre mouillée.Alors, je me sens soulagée.
J’ai bien fait de venir m’exposer, bien fait de passer le cap de cette réserve naturelle qui m’empêche souvent d’aller vers les autres.
J’ai aimé les sourires sur les visages amis, j’ai aimé les regards bienveillants, j’ai aimé les mains tendues. J’ai aimé ce dimanche, moi qui en temps normal déteste ce jour.
Mon petit village m’a donné la foi de continuer, continuer à dire, à écrire, à partager. Continuer à transmettre le savoir, les idées, se souvenir du passé pour pouvoir serein avancer vers l’avenir, s’ouvrir au monde en sachant d’où l’on vient.
N’est-il pas sage d’espérer autant ?
Solange
Solange la mésange me rend visite tous les matins et tous les matins nous devisons de la nature du genre humain.
-Je vous trouve compliqués vous les humains
-Pourquoi dis-tu ça Solange?
-Ca fait quelques temps que je t'observe, toi et tes congénères et souvent j'ai l'impression que vous cherchez les problèmes au lieu des solutions...
-Un exemple en particulier?
- J'aurais des milliers d'exemples mais je n'aime pas divulguer les secrets. Si tu savais tout ce que je vois à travers les vitres...
- Ah oui, tu dois en voir des vertes et des pas mûres!
- Tiens, prends cette expression, pourquoi utiliser une négation quand verte signifie déjà pas mûre
- C'est une figure de style...mais tu as raison, la langue française est très alambiquée
-Si les mots étaient plus simples, vos vies le seraient peut-être aussi. En même temps j'aime les mots, alambiqué me fait voyager, je m'imagine virevoltant dans un toboggan en cuivre géant. Les mots alambiqués doivent ressembler à des tire-bouchons...
- Solange, tu en as de l'imagination, même moi je n'aurais pas pensé à tout ça et pourtant dieu sait...
- Ah tiens parlons-en de celui-là! J'ai entendu dire que vous appeliez des papes Pie. Avez-vous déjà vu des animaux bâtir des cathédrales pour honorer une hypothétique entité supérieure? Y'a pas pis comme idée.
- T'es vache envers les hominidés!
-Ah ah ah, avec toi au moins je me marre (et ne me ressors le coup du canard, tu l'as déjà fait)
- Le cou du canard c'est meilleur farci
-Beurk! A propos merci pour le bonbon de graines, il est délicieux
- Ravie de te faire plaisir
- Bon c'est pas tout mais j'ai de l'air à fendre moi!
-A demain Solange, bon vent !
Corps vidé
Un sac plastique échoué sur un arbre se prend pour un oiseau. Un sac plastique noir échoué sur un arbre mort se prend pour un corbeau. Puis le vent l'emporte, le déchire, il n'est plus que lambeaux. Les corbeaux de plume rient de leur rire sarcastique. Ils attendent le dernier souffle des vies. Ils guettent sans daigner tuer. Pure perte d'énergie, la vie s'en charge très bien.
Quel délice cette chair gorgée de mort, ce goût unique de l'irréparable. Les corbeaux végétariens ne survivent pas et les vaches carnivores deviennent folles. Narcisse a chu dans la mare.Et Sisyphe se marre du haut de son rocher (au fait, quand est-ce qu'il mange?). Pas un pour rattraper l'autre.
Thème
J'aime les trous du gruyère
Et les quatre coins des petit-beurres
J'aime ce qui a le goût d'hier et les heures de l'hiver
J'aime les points de suspension
Les parenthèses et les questions
J'aime la nostalgie des airs d'accordéon
J'aime la crème de marron les chocolats chauds
Et le son des vieux pianos
J'aime la pluie dégoulinant sur les carreaux
J'aime le crépitement du feu
Et le souffle d'un vent fougueux
J'aime la flamme au fond de tes yeux
J'aimais les trous du gruyère
Et les quatre coins des petits-beurres
J'aimais les heures de l'hiver
Mais aujourd'hui je préfère
Le plein au creux
Les ciels lumineux
Et cette flamme qui éclaire
Un regard bleu
Au fond de tes yeux
Fil amant
Donc la pelote de laine, reprendre le fil, ne pas aller bêler avec le troupeau, se regarder dans la glace et se trouver beau (parce que ça rime). Avec le fil recoudre les boutons, éviter d'ajouter des pressions. Un crochet, une parenthèse (encore!), un uppercut, de la dentelle, les mots se brodent sur le canevas du temps. Rentrer dans son cocon, tisser des vers à soi et les offrir à d'autres, à des inconnus sur la toile quand les impudeurs se dévoilent, que les dessus laissent entrevoir les dessous. Et là Monsieur Devos apparaît, maître du non-sens, puisque sans dessus dessous ou vice-versa sans dans le vice verser. Je crois en lui puisqu'il existe, il s'appelle Raymond, quand l'autre n'a ni nom ni prénom. Qui s'est déjà posé la question du nom de Dieu? La suite demain, j'ai de l'huile sur le feu...