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Février 2021

Trois quatorze

Par Le 28/02/2021

Quoi de neuf dans ce huis-clos à deux ?
Rien qui ne casse trois pattes à un canard
Ce sont des gens modérés, jamais un mot de trop
Ils tournent sept fois leur langue dans leur bouche avant de parler
Ignorent les sept péchés capitaux
Peut-être ont-ils fait les quatre cents coups dans leurs jeunes années
Mais il ne reste rien de leur folie
Comptables moroses dans un bureau
Des semaines de trente-cinq heures
En guise d'espoir une grille de loto
Mêmes numéros jamais vainqueurs

Leur histoire n'est pas un conte des mille et une nuits
Pourtant ils restent unis comme les cinq doigts de la main
Et le resteront jusqu'à la fin
Avant de s'allonger six pieds sous terre
Dans le même carré au cimetière

Temps pis ?

Par Le 27/02/2021

J'aime la lumière d'hier
Regarder en arrière, fière
Le chemin parcouru ne le sera plus

J'aime les embruns d'aujourd'hui
Les souvenirs se volatilisent
Poussière des vagues qui se brisent

J'aime la couleur de la nuit
L'heure où les chats deviennent gris
Quand les mots vagabonds poétisent

J'aime la saveur de plus loin
La conjugaison aléatoire du futur
Espoir devient un verbe malgré les écorchures

 

Acouphènes polysémiques

Par Le 26/02/2021

Un bourdon bourdonne dans le jardin
Mais non ce n'est pas un bourdon , c'est la tondeuse du voisin, zinzin
Le Z c'était avant hier, pourtant voisin zinzin, je suis d'accord

Un bourdon bourdonne au loin
Mais non c'est la cloche qui sonne en mémoire des morts
Le M et N c'était hier pourtant elle résonne encore

Un bourdon bourdonne sur le chemin
Mais non c'est le bâton des pèlerins drelin drelin
Le D ce n'est pas fait pourtant c'est une idée

Un bourdon bourdonne dans les allées
Mais non c'est l'accord continu, un ison pas aigu
Le O magistral d'un orgue dans une cathédrale pourtant banale


Un bourdon bourdonne sans concession
Mais non c'est une faute de frappe, une erreur d'impression
Les lettres et les mots omis, pourtant ils étaient écrits

Un bourdon bourdonne dans la maison
Mais non c'est la mélancolie d'une chanson monotone
Le C du cafard à la tombée du soir, pourtant il ne fait pas nuit

Ce que l'on sème

Par Le 25/02/2021

Une erreur sur le clavier, haine devient son contraire. Il est courant de penser que les deux sentiments sont liés, que le premier ne peut apparaître qu'à la disparition du second. Je ne t'aime plus, je te hais ou tu ne m'aimes plus, je te hais.
Je hais le céleri pourtant je ne l'ai jamais aimé.
On peut haïr quelqu'un ou quelque chose, autrui ou soi-même puisque le verbe se construit aussi à la forme pronominale, idem pour aimer. Pourquoi n'y a-t-il pas de nuance entre "j'aime le chocolat" et "je t'aime toi". Le plaisir, l'intensité, la durée ne sont pas comparables, le palpitant ne bat à la même intensité. Un carré de chocolat qui fond dans la bouche est un plaisir éphémère et égoïste. T'aimer toi s'inscrit dans un espace-temps, une longue dégustation à partager. Ce qui donne à l'amour tout son piquant, toute sa saveur c'est justement le partage. Si le sentiment est unilatéral, il devient torture ou peut rendre zozo. Avant d'aimer l'autre ou de s'aimer les uns les autres, il est indispensable d'utiliser le verbe pronominal.
S'aimer soi-même, essaimer des petits cailloux sur les routes sinueuses des rencontres amoureuses, pour pouvoir se retrouver quand la touche M est remplacée par N sur le clavier.

Moi non plus je t'haime.

 

Zoom zozo

Par Le 24/02/2021

Un zèbre zélé zozotait sur les rives du Zambèze. Il hésitait entre plusieurs mots en -ze pour exprimer ses zémotions.
Zigzaguant à travers les joncs, il aperçoit des zippopotames qui zoukent au son d'un bouzouki.
Un doux alizé s'étire dans l'azur du soir. Un soleil zinzolin s'écrase à l'horizon. Dans ces zones zarides, à la tombée de la nuit, les zanimaux zinzibulent, gazouillent des notes de jazz. Un joyeux bazar dans la savane, loin des zizanies zhumaines.
Ces zigotos à deux pattes qui détruisent leur écosystème avec des zobjectifs de plus en plus zobtus. Faire voler les zavions toujours plus haut au-dessus de la couche d'ozone, en zyeutant sur les zautres planètes pour en trouver une d'occazion en cas d'anéantissement. Quand l'homme sera transformé en zombie, que restera-t-il de sa folie ? Plus de mosaïque de pays, du Mozambique à la Tanzanie, une morne plaine sans zespoir, sans zillusion.
Ce jour là, peut-être demain, j'irai vivre en Zambie parce que c'est plein de zambiens

Rhapsodie in blue

Par Le 23/02/2021

Il fait toujours bleu
Un peu plus loin
Partir à pied
Prendre un train
Changer d'angle de vue
Si la roue tourne carré
S'offrir un autre aperçu
S'élever au-dessus du plancher

Il fait toujours bleu
Quelque part
Partir seul ou à deux
Prendre un nouveau départ
Les perspectives depuis les sommets
Sont plus spectaculaires
Fermer les yeux
Et s'endormir heureux en haut d'un belvédère

 

Salade nîmoise

Par Le 22/02/2021

Madame Nîmes
S'anime de pensées intimes
Elle traîne sa bonhomie
Du côté des Arènes
Doit rejoindre ses amis
Aux Jardins de la Fontaine
Mais décide de flâner
Sur la Place du Marché
Salue le crocodile et son palmier
En temps déconfiné

Elle se serait assise en terrasse
Pour déguster une glace

Madame Nîmes
Aime les plaisirs infimes
Elle continue la balade
Emprunte la rue Fresque
S'attarde sur les façades
Apprécie le pittoresque
Arrivée à la Maison Carrée
Elle traverse l'allée
Ne voudrait pas être en retard
Elle reviendra plus tard visiter le Carré d'Art
Et se dirige à pas de loup
Vers le lieu de rendez-vous

Madame Nîmes
Affiche une mine badine
Le soleil l'éblouit
Sourit à ce dimanche et sa belle éclaircie
Photos au Temple de Diane
Grimper à la Tour Magne
Superbe panorama depuis le belvédère
Malgré les gestes barrière
Profiter de l'instant et renoncer au pire
La ville en perspective s'étire
Il est temps de prendre un verre
Et en toute sérénité trinquer à l'avenir




 

L'insoutenable légèreté...

Par Le 21/02/2021

- Je trouve que tes billets, certains jours c'est léger...
- Que veux-tu , ce n'est pas tous les jours facile de se renouveler, d'être visiter par la fée inspiration, d'avoir des idées de génie.
- Mais pourquoi écrire si c'est pour ne rien dire ?
- Pourquoi quelque chose plutôt que rien ?
- C'est tout à fait ça!
- Parce que c'est d'abord un contrat avec moi-même. Puis après avoir résolu le sens ou le non-sens de l'existence, il faut bien trouver ce qui la rendra supportable au quotidien, rester à flot, tenir la barre, malgré les inondations, les tempêtes, les coups de grisou.
- Se donner des contraintes pour mieux apprécier sa liberté ?
- Oui en quelque sorte. Si tout est trop léger, si rien n'a d'importance, quel intérêt ? Milan Kundera l'explique bien mieux que moi.
- Oui, ça je l'avais déjà remarqué chez toi et exprimé je crois, beaucoup de mots peu d'idées.
- Tu es conscient que ce que tu dis de moi s'applique aussi à toi puisque tu n'es qu'une partie de moi-même.
- J'en suis conscient mais ça ne fait pas avancer le débat. Tu commences une explication puis tu cites un nom célèbre, une pirouette, deux entre-chats et par ici la sortie. Je reste sur ma faim moi.
- Je sais, je manque de rigueur dans l'élaboration de ma pensée. Un nombre de neurones insuffisant pour aller plus loin dans mes ambitions. " Je voudrais bien mais je peux point".

- Ah oui, je vois les références. Et je suppose que tu vas tout remettre à demain en prétextant que quelqu'un t'attend.

- Comment t'as deviné ?

 

 

U privatif

Par Le 20/02/2021

Utopie vient du grec -u-, signifiant non et de -topos, lieu. Un non lieu donc.
Uchronie, même préfixe et chronos, temps. Un non temps.
Deux concepts qui en se définissant s'annihilent eux-mêmes tout en prouvant qu'ils existent en tant que mots.
Dystopie, une distorsion de la réalité ?
Robert en donne la définition suivante: récit de fiction qui décrit un monde utopique sombre.
La rousse ne peut s'empêcher d'émettre un doute raisonnable quoi que irraisonné. Pour moi le non lieu sous-entendait une notion d'idéal.
Genre "La petite maison dans la prairie" sans Nelly Oleson (la méchante pour ceux qui ne connaissent pas leurs classiques).
Par là même, dans l'uchronie, Laura Ingalls likerait tous ses amis sur les réseaux, tandis que se cacherait une "hater" derrière Nelly la peste.
Dans une dystopie, elle aurait entièrement pris le pouvoir en soumettant tous les habitants de Walnut Grove à son bon vouloir.
Vous avez compris ? Sinon tant pis, mes yeux n'ont pas assez vu leur lit et commencent à papillonner en mode code-phare pendant que la grande aiguille avance inexorablement vers l'heure des courges. J'y cours-je de ce pas, en petites foulées gracieuses.

 

De mal en pis !

Par Le 19/02/2021

J'attendais mieux mais il n'est pas venu
Alors je n'ai plus attendu
Comme je m'étais déjà rendue à l'évidence
Je n'y suis pas revenue
J'avais pris mon mal en patience
Auparavant
Alors je me suis mise à nu
Derrière un paravent
Sans pour autant tomber dans le panneau
Il était trop tard pour se coucher tôt

J'attendais mieux et je l'ai rencontré
L'ennemi du bien
Dans son aspect le plus dénudé
Il cherchait la petite bête dans un coin
Sans
se prendre les pieds dans le tapis
Alors que fait-on ? Lui ai-je dit
Revenons à la source
Ralentissons la course
Savourons l'instant de cette eau pure
Puisque rien ne dure
...

Lotophages

Par Le 18/02/2021

J'ai oublié mes clés, je ne sais pas où elles sont mais je sais qu'elles existent. Je me souviens encore d'elles en tant qu'objet, de leur utilité. Donc l'oubli n'est pas radical, oublier c'est encore se souvenir que quelque chose existe, a existé.
J'ai oublié beaucoup d'événements de mon passé, pourtant je ne suis ici que parce que je suis passée par là. Si j'avais choisi le chemin B au lieu du A, où serais-je aujourd'hui ?
Dans une rue de Brest à me rappeler la pluie qui tombait sans cesse ce jour là ?
Sur l'île des Lotophages à croquer les fruits de miel pour oublier mon âge ?
Peut-on voyager sans bagage et ne pas perdre la raison ? Qu'est devenu Gaston, lui qui voyageait sans ? Je ne m'en souviens pas.
Je me posais la question en tentant de me remémorer où j'avais bien pu laisser ces fichues clés puis me lançai dans une quête du Graal, une tentative désespérée pour retrouver le bout de métal. Et non, je ne composerai pas le 06 de Lacan, ni ne m'allongerai sur un divan à scruter mon inconscient.
-Inconscient toi-même, vociféra Jean-Sol.
-Un peu de retenue tout de même M. Partre, inconscient n'est pas une insulte ! Si vous alliiez vos théories plutôt que de vous tirer dans les pattes constamment, vous en sortiriez grandis (même si j'avoue que c'est pas acquis, il est tellement petit!).
-Je ne vais pas répéter ce que j'ai mille fois écrit. L'homme n'est que par ses actes et entièrement responsable de son existence, il est libre de se détacher de son passé, de choisir son présent et d'envisager son avenir.
- Oui, et la femme ? Et n'est-ce pas parfois un peu réducteur ? Il est des histoires de vie plus compliquées que d'autres. Vous dans votre microcosme d'intellectuels parisiens vous avez été épargné.
- Certes, certes. Mais pourquoi faire appel sans cesse à moi, oubliez-moi et laissez-moi reposer en paix.
- Je peux choisir de vous oublier mais je saurais quand même que vous avez existé, j'ai des livres de vous dans ma bibliothèque
- Bon moi depuis que je suis allongé dans ce carré avec Simone, j'ai renoncé à la philosophie. On s'adonne maintenant aux joies simples de l'éternité. Un petit coup de blanc et en avant Guigamp, moi je conduis, elle klaxonne.
-Hé bien, j'en apprends de bonnes ! Donc vous ne voulez pas m'aider dans ma fumeuse théorie ?
-Non et je ne crois pas à la vie après la vie. Je n'existe plus, à part dans votre tortueuse imagination.
- Ah ! La mémoire me revient, je n'ai pas perdu mes clés, je les ai simplement jetées, je ne supportais plus d'être enfermée !
-Vous m'amusez finalement, revenez quand vous voulez, nous rediscuterons de l'oubli et je vous donnerai des clés pour décrypter mes théories.
-Une clé de Jean-Sol en somme.
-Oui mais sans faire la sieste.
-Si vous devenez aussi tordu que moi dans le détournement des mots, on s'en sortira pas.
-Oh mais ça je le sais déjà que je n'en sortirai pas de là où je suis, alors un peu plus, un peu moins, tant pis!

J'ai finalement pris la clé des champs pour faire un tour dans le présent puis la clé des songes pour éclairer mes nuits, et les clés de métal, je les ai jetées au fond du puits.

De bon heur

Par Le 17/02/2021

Mer de brume matinale
Les vignes un peu bancales
Un rapace quelques souris
Dans ce temps imparti


Rayons obliques d'ultra-violets
Filtrés par les nuages
L'horizon hypothétique deviné
Dans ce naissant paysage


Une chapelle romane
Des ronces sur le chemin
Dans un pré deux ou trois ânes
Savoir aller plus loin

Effacer les goutelettes en suspens
Voir briller le disque incandescent

Dépasser l'épais brouillard
Et serein goûter l'espoir

 

 

 

 

Beau temps ?

Par Le 16/02/2021

Il fait bleu, il fait vent
Et le souffle d’Éole s'engouffre dans les blousons
Un jour sans école, les mystères de la création
Il fait bleu, il fait vent
Des mots d'enfant
Et les fleurs chinoises s'envolent plus loin vers l'horizon
Il fait bleu, de l'eau salée, des embruns, paroles sibyllines
Il fait vent, brise marine
Incompréhension de l'enfant
Face à l'incrédulité des grands
Il écarquille ses deux yeux
Il fait pourtant beau temps
Dans les allées du bon dieu
Désolée mon enfant, je crois plus au vent et au bleu
Qu’au royaume des cieux
Et du mystère de la création
J'ai résolu la question
Ah bon!

Classé X

Par Le 15/02/2021

J'ai des complexes, je suis perplexe à la lecture de mes textes. Pourtant je continue chaque jour à exfiltrer des méandres filandreux de mon expectatique cerveau, des mots, à en extraire des idées, à exploiter mes idéaux ex abrupto.
J'extrapole du nord au sud, j'exulte et s'exhalent de mon myocarde extatique des sentiments extravagants, d'exquises inclinations. J'expérimente d'indiscrètes sensations, une exégèse sans réelle explication. J'exagère dans le mystère, une attitude sibylline, préserver sa part intime ?

Ex-voto virtuel en rime, exploiter ses maux en mots pour extirper la substantifique moelle de l'existence. J'excelle dans le doute existentiel mais l'important n'est-il pas d'avoir des tourments excessifs ? Ne pas se contenter de l'approximatif. Sentir battre le palpitant, s'exalter avec candeur, exiger le meilleur même quand le monde ne tourne pas rond à l'extérieur, qu'il ne fournit pas toutes les explications.
Se laisser désaxer par les lois de l'attraction et savoir se poser sans exaspération. Carpe diem avant l'extrême onction !


N.B: certains mots ne sont pas exacts mais se sont laissés détourner pour l'exercice !

Oubliettes

Par Le 13/02/2021

Je ne voudrais pas oublier
La douceur de ta peau
La pluie sur les carreaux
En ce soir de janvier


Je ne voudrais pas oublier
Tes bras autour de moi
Le soleil qui brillait
En ce mois de juillet


Je ne voudrais pas oublier
La caresse de tes mots
Le vent dans les chéneaux
Aux petits matins de mai

Je ne voudrais pas oublier
Mais le temps abandonne
Les souvenirs secrets
Aux premiers jours d'automne

Il les range plus loin
Et poursuit son chemin
Les laisse s'effacer
Pour espérer demain




 

Patience et longueur de temps...

Par Le 13/02/2021

Prendre son mal en patience
Quelle drôle d'expression
Assignée à résidence
En quête d'explications
Je compte les billets d'absence
Cherche réponse à la question
Dans le sillon de mes errances
Hypothétiques solutions
Mais l'écho sourd du silence
Anéantit mes ambitions
A la lueur de mes espérances
Dansent des points d'exclamation

Prendre son mal en patience
Une intime conviction
Assignée à résidence
En quête d'inspiration
Je contemple mon ignorance
Emets des suppositions
Dans le flot de réminiscences
Halos d'illumination
Mais trop peu de résonnance
Pour nourrir mes illusions
A la lueur de mes errances
Dansent des points de suspension





 

Expressionnisme

Par Le 12/02/2021

J'ai un petit pois sous mon matelas, c'est peut-être pour ça que je ne dors pas
J'ai un caillou dans ma chaussure, difficile de marcher droit
J'ai le compas dans l’œil, ça m'empêche d'y voir clair
Je suis souvent à côté de la plaque, je confonds aujourd'hui et hier
Je n'aime pas la barbapapa, ce n'est pas une expression c'est un fait
Je passe du coq à l'âne, mais aucun des deux ne me satisfait
J'écris comme je respire, ça ce serait mentir
J'en vois des vertes et des pas mûres, je n'en fais pourtant pas de la confiture
Et quand je ne tourne pas rond, il me vient des questions sur les racines carrées
Ou bien je prends la tangente pour partir à Tanger
Mais je ne suis jamais allée à Tanger et la tangente je ne sais pas ce que c'est
Alors je reste plantée là, avec mes racines carrées, mes questions
Et une crainte pour Cendrillon
Est-ce désormais à 18 heures qu'elle se change en potiron ?


 

A moitié vide

Par Le 12/02/2021

Pas facile de trouver de la poésie dans chaque jour quand la mosaïque des horreurs humaines s'affiche devant nos yeux.
"Plus je connais les hommes, plus j'aime mon chien" disait Pierre Desproges. Aujourd'hui, je songe à en adopter un.
Pas facile de se laver les yeux et les oreilles, de ressortir indemne d'une journée de dur labeur passée à aider ses semblables.
Semblable toi-même, l'entends-je me souffler. Mais les mots sont verrouillés, les doigts paralysés sur le clavier.
La magie d'un rayon de soleil couchant sur les sommets enneigés, la rencontre d'un faisan serein sur le bord de la route n'auront su me distraire de ces ignominies.
Les belles plumes, élevées puis lâchées pour quelques heures de liberté, se feront tirer demain par des chasseurs bedonnants.
Les glaciers finiront par fondre précipitamment provoquant une montée subite des océans et l'anéantissement de l'ère du vivant.

"Plus je connais les femmes, moins j'aime ma chienne". Sacré Pierrot, toujours le mot pour rire.
"Quant au mois de mars, je le dis sans aucune arrière-pensée politique, ça m'étonnerait qu'il passe l'hiver".
Heureusement on est en février

 

Ligne d'horizon

Par Le 10/02/2021

Montagne bleue
A l'horizon
Ligne de tes yeux
Haute tension
Arbres inertes
A l'encre de Chine
Tableau sous la bruine
Vue d'une fenêtre
Une lucarne contemplative
Loin des néons
Une digression méditative
Pour s'échapper d'une réunion

Montagne bleue
A l'horizon
Loin de tes yeux
Baisse de tension
Arbres inertes
Par la fenêtre
Une île déserte
A l'encre de Chine
La pensée chemine
Entre les néons
Grande évasion
Par le faux plafond

Le vin bourru

Par Le 09/02/2021

"Le déchet n'existait pas encore, ni la poubelle, ni le ramassage des ordures [...]
Rien ne se jetait. Toute boîte de conserve vide s'emplissait de graines, ou de boutons, ou d'appâts pour la pêche. [...]
L'idée même de jeter -mais jeter quoi ? et où ? -eût semblé absurde. " 

J'ai connu les miettes de ce temps ancien, où les femmes allaient faire les commissions à l'épicerie avec un filet à provisions.
J'ai connu les cabanes de jardin ou les caves avec des boîtes de conserve remplies de clous ou de ficelle.
Rien ne dure mais tout recommence.
Après l’ère du tout jetable, nous revenons à l'ère zéro déchet. Pourtant il est difficile de freiner cette frénésie de surconsommation, d'autant plus qu'elle ne s'est pas arrêtée aux objets, elle a atteint les relations humaines. Un nouveau vocabulaire pour faire d'un coup de cœur un "like" en mode "swipe" et tout un lexique d'anglicismes pour décliner les dérives tordues d'humains déviants.
Plus de bonjour ni d'au-revoir en signe de politesse, de respect entre mammifères éduqués.
Salue-t-on un sac plastique, un pot de yaourt ou un mégot de cigarette ? Non, on le laisse choir, on l'écrase du bout du pied sur le trottoir, il partira dans le caniveau balayé par un jet d'eau.
Non ce n'était pas forcément mieux avant. C'était sûrement mieux caché.
Mais les mots et les pensées me font aussi dériver du sujet initial, ça ne me vaut rien d'écouter les infos.

"Un million de choses à dire de la vie, très peu de la mort. Personne ne sait bien en parler, pas même le curé avec ses histoires de vie éternelle, qui passent au-dessus des têtes.[...]
" Là où il est maintenant", disait-on. Mais il n'est nulle part, on le sait bien, il est simplement mort, comme d'autres avant lui, et d'autres après.
On le mettra demain au cimetière, dans son caveau, là où il a toujours su qu'il finirait, chez lui".

Le vin bourru, Jean-Claude Carrière (1931-2021)

 

 

Griserie

Par Le 08/02/2021

Le ciel dégringole en gouttes sonores
Le noir succède au gris

La nuit révèle ce que le jour ignore
Petits arrangements avec la vie
Un couvre-feu sur les envies
Une couverture sur le lit
Un éteignoir sur les bougies
Des compromis
Une liberté conditionnelle
Des émotions non essentielles ?
Le vibrato d'un violoncelle
La folie que la nuit honore
Quand le ciel dégringole
En gouttelettes sonores
Sous les vapeurs d'alcool



 

Détour vers le futur

Par Le 07/02/2021

"Le temps qui passe ne revient pas. A moins que... ? Cette vérité inéluctable et parfois difficile à accepter, gravée dans le marbre des théories physiques fondamentales n'est peut-être pas la seule possibilité. Un physicien britannique a conçu une alternative, où du big bang s'écouleraient deux flèches du temps avec deux Univers distincts !"   https://www.science-et-vie.com/technos-et-futur/

Mes capacités cognitives ne me permettent pas de comprendre toutes les subtilités du sujet mais je reste fascinée par l'hypothèse. Moi qui écrivais hier, le passé était, le futur sera, le présent est. Comment conjuguerait-on si le passé revenait ?
Hier j'étaisserai, demain je serétais, aujourd'hui je sais ?

Aujourd'hui, ce que je sais c'est que je ne sais rien (je ne m'appelle pourtant pas Jean Gabin).
Je sais que j'en sais trois fois rien. Même en multipliant la somme de mes ignorances, le résultat ne décolle pas de zéro.
Le physicien à l'origine de la découverte, Julian Barbour, a nommé "point de Janus" , le point de départ de ces deux flèches du temps. Janus je connais, j'en ai fait un billet ! Plus loin on peut lire "c'est l'entropie, autrement dit le désordre toujours croissant de la matière, qui impose également à une tasse de thé brûlante de se refroidir, à nos corps de vieillir ou encore aux nuages de se dissiper. Mais cette unique flèche entropique du temps fait débat chez les physiciens."

Tout ça aussi je connais, c'est joli comme de la poésie! Mon thé refroidit dans sa tasse tous les matins, mon miroir tient le décompte chaque jour d'une sortie de quarantaine imminente, et les nuages heureusement finissent par se dissiper, puisqu'après la pluie vient le beau temps.
Faut-il se réjouir du désordre toujours croissant de la matière ? Je ne saurais dire. Ma matière grise à moi est souvent en ébullition, bouillonne comme du magma en fusion mais n'a pas forcément les capacités de comprendre des concepts élaborés.
Juste la possibilité de penser à ce que serait le calendrier si hier était demain, aujourd'hui incertain et le futur pas sûr vu la conjoncture. Et si on pouvait revenir dans le passé et tout changer ! Ce sera ou ce fut un autre billet dans cet univers ou son parallèle. Et s'il en manque un dans le décompte de mes résolutions vous pourrez aller voir ailleurs si j'y serai !

Lettre et le néant

Par Le 06/02/2021

- On ne s'écrit plus, s'écrie ma boite aux lettres alors que je regarde ce qu'elle a dans le ventre
- Que veux-tu! Le courrier se déplace à pas de tortue alors que le lièvre internet délivre des messages en quelques millièmes de secondes
- A quoi je sers dans ce cas ?
- Tu reçois des courriers administratifs, nécessaires au bon fonctionnement de la nation.
- Je les aime pas ceux-là, ils n'ont aucun vocabulaire, aucune conversation, des formules toute faites et souvent des appels à contribution. Les gens intéressés ne sont pas intéressants.
- (Tiens cette expression me rappelle quelqu'une); c'est vrai pas grand intérêt, mais si tu ne les ouvres pas, intérêts tu auras à payer, enfin moi, pas toi.
- Tu vois, moi je ne suis d'aucune utilité dans cette société. Je passe ma vie à attendre, je ne peux même pas aller faire un tour, je suis plantée là et je suis constamment soumise aux caprices du temps. Non crois-moi, c'est pas facile d'être moi.
- Je te comprends mais que veux-tu que j'y fasse, je ne vais pas m'envoyer du courrier pour pallier ton sentiment de vacuité.
D'ailleurs moi-même je n'écris plus de lettre, je n'écris presque plus sur du papier. Il faut vivre avec son temps.
-Je trouve que c'était mieux avant
-Avant quoi ? Moi je trouve pas. Certaines choses étaient mieux mais beaucoup étaient pire. Puis le passé est ce qu'il était, le futur ce qu'il sera, seul le présent est ce qu'il est.
- Ma grand-mère me parlait de toutes les belles lettres qu'elle recevait, de tous ces papiers colorés ou unis, de premier choix, caressés par une plume d'oie. C'était joli et elle se régalait de lire tous les secrets.
- Parce que tu lis mon courrier !
- Faut bien passer le temps. Mais je n'ai rien de passionnant à me mettre sous la dent.
- Tes voisines sont sympas ?
-Il n'y en une avec qui je m'entends, les autres sont dans l'hyper consumérisme, avalent des liasses de publicité et se sentent
obligées de commenter les bonnes affaires de la journée. Ce n'est pas ma tasse de thé.
- Et tu sais, quant à l'utilité de chacun sur cette planète, c'est bien relatif. Qui est utile, qui ne l'est pas ? Et puis en ce moment on est un peu tous plantés là. L'essentiel c'est de trouver quelque chose qui t'anime, qui te donne envie de te réveiller le matin.
- C'est le chien du voisin qui me réveille tous les matins ! Ce qui m'anime (mais chut c'est un secret) c'est d'écrire. Tu voudrais lire mon poème ?
- Avec plaisir !

Blues d'une boîte aux lettres

J'aimerais recevoir une lettre
Une lettre manuscrite bien écrite
Sur un papier de premier choix
Bien écrite
A la plume d'oie

J'aimerais recevoir un courrier
Un courrier en rime ou en prose
Dans une enveloppe parfumée
Aux pétales de rose
Pétales de rose séchés

J'aimerais recevoir un billet doux
Un billet de Papeete de Tombouctou
Respirer l'air des îles
En déchiffrant des mots subtils
Ou des mots de rien du tout

J'aimerais recevoir une carte postale
Une carte d'aurores boréales
Sortir de cette boîte de métal
M'évader aux quatre coins du monde
Même si la Terre est ronde

J'aimerais recevoir une invitation
Une invitation pour de lointaines destinations
Visiter des contrées éclatantes
Adressez désormais votre courrier
En poste restante

- C'est pas mal, y'a de l'idée, continue !
- Merci, ça fait un bien fou de parler avec toi.
- Y'a pas de quoi !



 



             

Carnaval es arribat

Par Le 05/02/2021

Non je ne m'habitue pas à croiser des humains masqués. J'ai l'impression de vivre dans un film de science-fiction.
Il y avait au départ les pour, les contre, les sans opinion, ceux qui opinaient inopinément.
Devant la fragilité de notre condition, nous avons accepté d'évoluer dans cet univers dystopique depuis bientôt un an.
Des mots nouveaux sont apparus pour tenter de comprendre, d'expliquer la restriction de nos libertés.
Covid d'abord, employé au masculin, que des gens sûrement occupés à ne rien faire, ont changé de sexe par la suite. Pour se protéger de la petite bête serial-killeuse, le Confinement. Une première expérience, plutôt plaisante pour beaucoup, une pause dans la frénésie des jours, un temps pour soi, l'espoir d'un renouveau, d'un changement radical de comportement à l'issue de l'enfermement. Ce fut l'éclosion des ApéroSkype, des Zoomeeting, ou autres rassemblements virtuels dans un ciel de printemps.
Puis une tentative de reprise de vie ordinaire en respectant les Gestes Barrières, la Distanciation Sociale et Physique, armés de Gel Hydroalcoolique, nous avons pu descendre dans la rue, Déconfinés qu'on était, sans Attestation de déplacement.
Puis Carnaval es arribat, sorties masquées obligatoires, même dans les rues où il ne traîne pas un chat, ni une chauve-souris ou un pangolin. Dans ces mêmes rues sombres où se trament les théories complotistes d'une fin du monde programmée sur la paillasse d'un laboratoire chinois.
Bref, on a dansé tout l'été et nous sommes retrouvés fort dépourvus quand la bise fut venue. Et plus moyen d'aller crier famine chez la fourmi notre voisine, le Reconfinement était acté. Il fallait en plus s'auto-isoler si on était Cas Contact avéré et bien sûr faire un Test PCR et Téléconsulter son médecin au moindre doute.
Trève des confiseurs, Papa Noël devait pouvoir descendre dans les cheminées et remplir les petits souliers. Mais si l'on était pas tous les jours très sages, un 3ème confinement serait décrété? Alors on a fait manger Mémé dans la cuisine, on a évité de faire la bise aux frangines pour la nouvelle année, on a même pensé faire une téléfête en faisant tourner les serviettes devant Patrick Sébastien (bon ça ce sera pour la Saint Glinglin et je ne veux surtout pas être là pour voir ça).
Malgré tout ça, increvable la bestiole à picots. Pour échapper au re-re confinement et faire mentir l'adage, le Couvre-Feu où comment nous apprendre à rester sages.
Pendant ce temps et ce depuis le début de la Pandémie, les supermarchés sont pleins à craquer, les gens excédés se marchent sur les pieds, se postillonnent dessus, parce que faut pas croire que le français soit un modèle de propreté. D'après une étude sur l'hygiène, seuls 73% des hommes changent de caleçon tous les jours. Donc de là à changer de masque 2 fois par jour.
Tout ça pour dire que j'en ai marre, ras le bol, ras la casquette, ras le bonnet, j'en peux plus ! J'en peux plus de sortir du boulot à 17h30 et de retourner m'enfermer sans espérer aller boire un verre, rencontrer d'autres humains démasqués, se faire une toile, respirer un peu d'art frais. Reste à regarder les étoiles mais les ciels d'hiver sont trop souvent couverts.
A Limoux fin mars c'est la nuit de la Blanquette, on fête la fin de Carnaval en le faisant cramer sur la place publique, après l'avoir jugé et accusé de tous les péchés. A quand la nuit du Corona et les pintes de bière coulant à flot où l'on pourra faire brûler tous nos masques, enfin voir nos visages nus et espérer un renouveau ?

L' Escalier de Louis

Par Le 04/02/2021

Etre "de quelque part", faire partie d'un lieu, d'une époque, d'une communauté de gens croisés au fil des ans.
J'allais à "l'Escalier" depuis mon enfance, pizza 4 fromages et glace au café. J'étais fascinée par le décor, la musique, l'ambiance conviviale. On s'interpelait d'une table à l'autre et les serveurs avaient un petit mot pour chacun. Les amis s'y retrouvaient, les âmes égarées venaient chercher un peu de réconfort. Avec mes yeux d'enfant, j'avais ce sentiment sécurisant des choses immuables.
Puis les repas de classe du lycée, passage incontournable avant de finir les nuits au "Privé". C'était il y a longtemps.
De l'eau a passé sous les ponts, et l'enfant a eu des enfants. Fascinés par le lieu eux aussi. Charlotte curieuse et gourmande a dû goûter toute la carte, Roman est resté à l'invariable combo pizza 4 fromages, glace au café ! (ce sentiment sécurisant des choses immuables ou atavisme culinaire ?!).

On ne venait pas à l'Escalier seulement pour se restaurer, on venait y trouver un peu de chaleur humaine, partager un moment, écouter, voir et vivre son époque, comme un instantané d'un moment donné, actualités en live d'un instant T.
C'était aussi le seul endroit où l'on pouvait espérer manger à n'importe quelle heure, quand les cloches sur Carca avaient sonné.

Et les cloches sur Carca ou ailleurs finissent toujours par sonner. Et non les choses ne sont pas immuables.
Il nous aura accompagnés pendant plus de trois décennies, il aura rythmé nos soirées de jeunesse, offert ce hâvre d'amitié, été le témoin de nos vies.
Aujourd'hui nous t'accompagnons pour gravir les dernières marches d'un escalier éternel, bon voyage Louis vers un ciel plus clément sans virus et tous ses variants.


 

Paréidolie

Par Le 03/02/2021

Un oiseau sur la branche
Ou une feuille oubliée
Une feuille de papier ?
Une lettre envoyée
Par un jour de grand vent
Une adresse erronée
Dans un espace-temps

Un oiseau sur la branche
Une feuille de papier noir
Les espoirs en suspens
Une lettre égarée
Dans le déclin du soir
Une adresse décalée
Par un facteur distrait

 

Un oiseau sur la branche
Ou une feuille accrochée
Une image écorché
e
Une lettre manuscrite
Le soleil au zénith
Une adresse exacte
L'oiseau était un mythe

 

Des confitures

Par Le 02/02/2021

Un carré de chocolat
Des ronds dans l'eau
La poésie du soleil levant
Tableau vivant
Et mouvant

Une confiture de mots
Les conserver en pot
Saveurs édulcorées
Regards amoureux
Sur une boule bleue

Un carré de chocolat
Quand le monde ne tourne pas rond
La poésie du soleil couchant
Tableau figé
Essouflé
Une confiture de mots
Les conserver en pot
Saveurs acidulées
Les étaler les soirs de doute
Et continuer sa route

 

Sur un trapèze

Par Le 01/02/2021

Je m'endors dans le décor à l'envers
Suspendue par les pieds
Quelle idée pour trouver des rimes en -é
Des vers en -ers
Cacher ses impudeurs dans des alexendrins
Des sonnets des quatrains
Un dédale idéologique
Suivre le fil liturgique
De ces allitérations idylliques
Un point de vue différent
Sur le monde et les gens

Ridicules fourmis
Agitées de tremblements
Des hommes tout petits
Secoués par le vent

Suspendue par les pieds
Je regarde
A l'envers
Le décor vaciller
Dans un élan d'impudeur
Je me défais de mes dessous
J'envoie valser les erreurs
Les tabous
J'en vois passer de toutes les couleurs
Des pensées de quat'sous
J'abandonne mon corps
Au balancement du trapèze
Puis fatiguée de chercher une rime en -èze
Dans l'envers du décor
Je m'endors