2020

Dans 2020

Dernier billet

Par Le 31/12/2020

Dernier jour de 2020 , un lieu commun pour une année pas banale. L'heure des bilans et des bonnes résolutions, alors que demain ne sera que la continuité de la veille. On carpera diem et les roses et les épines à pleines mains si on ne nous parque pas sine die ( j'ai fait latin en Langue Vivante 2, après elle est morte). Je continuerai à abuser des parenthèses, ne vous en déplaise. Je résoluerai d'écrire un billet chaque jour que dieu fait (si le jour est l’œuvre de dieu, la nuit est-elle celle du diable?). Dix ans après, je m'apercevrai que le compte n'y est pas mais je continuera (si dieu me prête vie).
Je devrais me résoudre à appeler Lacan, parce que c'est quand même curieux d'évoquer sans cesse le tout puissant alors que je n'y crois pas.
J'ai essayé d'obtenir un rendez-vous (avec Lacan pas avec Dieu), mais il était indisponible pour cette éternité, alors en attendant la prochaine, je me suis allongée sur mon divan, munie de ma plus belle plume et d'une feuille blanche et j'ai laissé les mots dériver (l'exercice n'est pas inédit pour moi, toi fidèle lecteur tu connais ma propension aux détournements d'idées)
Et même si c'est le dernier billet de ce dernier jour de l'année, je ne me mettrai pas à nu devant vous, en vous livrant tous les secrets de mon inconscient. Et bien sûr là c'est le branle-bas de combat dans mon encéphale. Je fais de l'écriture automatique mentale! Ça promet pour le premier billet du premier jour de la nouvelle année.

 

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Ou de force

Par Le 29/12/2020

Une théière en gré ou en regret
Les événements d'hier
A la lumière d'aujourd'hui n'ont pas la même clarté

Une théière en verre ou en ver
La transparence du thé
A la lueur d'aujourd'hui n'a pas les mêmes reflets

Une théière en fer ou paradis
L'âpreté du passé
Dans la flamme d'aujourd'hui n'a plus le même bouquet

Une théière en terre ou par terre
Mosaïque éclatée
Au soleil d'aujourd'hui efface tous les regrets

 

Dans 2020

Porter aux nues

Par Le 28/12/2020

Il tombe des nus
Des tas de gens dévêtus
Ils ont froid
Ils grelottent
Et ça fait aïe ou ça fait ploc
Quand ils échouent sur le carreau
Quel manque de pot !

Il tombe des nues
Des tas de ballerines sans tutu
Elles frissonnent
Elles virevoltent
Et juste un léger bruissement
Quand elles posent les pieds innocemment
Quel ravissement !

Il tombe des nus
Des tas de gars tout poilu
Ils ont la chair de poule
Ils vocifèrent

Et c'est des cris de mammifère
Quand ils déboulent de l'atmosphère
Quelle misère !

Il tombe des nues
Des tas de filles sans vertu
Elles frémissent
Elles serrent les cuisses
Et des soupirs des gémissements
Quand enfin elles atterrissent
Quelle malice !


 

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Vous les hommes

Par Le 27/12/2020

Vous m'en aurez fait voir de toutes les couleurs.
Des matins blancs et des nuits étoilées. Du vert espoir, la vie en rose et aussi des jours moroses. Je vous ai haï, vous ai maudits quand vous n'en finissiez pas de vous taire, quand je rêvais de vos baisers dans le cou et qu'avec moi vous ne rêviez de rien du tout. Quand vous étiez à mes côtés pourtant déjà partis si loin. Sombres heures sans sommeil, longues journées sans arc-en-ciel, une interminable traversée du désert dans le silence des absents.
Puis les bleus azur, les coups de coeur, les rencontres hasardeuses, y croire un peu , profiter de l'instant même si rien ne dure vraiment.
Parce que malgré les plaies, les cicatrices, les blessures du dedans, l'amour est, de la vie, le piment.
Parce qu'après la haine, la rancoeur, les déceptions, le déchirement, il est un temps où les souvenirs redeviennent beaux, où l'on repense aux bons moments sans ressentir de douleurs lancinantes au milieu du ventre.
Vous les hommes du paléolithique, je vous accorde mon indulgence et vous laisse à la chasse, la pêche et à la vie dans l'ombre des cavernes. J'avance dans la clarté, sereine, et cueille sans souci les roses de la vie!
Et qui dit roses dit épines, mais que serait la vie sans piquant !


 

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Béchamel

Par Le 26/12/2020

Il grésille
Du grésil

-Le verbe grésiller dans ce cas est impersonnel et ne tolère donc pas l'emploi d'un COD
- Oui je sais mais Robert m'octroie certaines libertés

Le grillon grésille tout l'été et se trouve dépourvu
Quand la bise fut venue

- Concordance des temps!
- Comment voulez-vous faire concorder l'hiver et l'été
- Concorder est intransitif
- Ah oui, je me confonds!
- Confondre n'est pas pronominal dans cet emploi là
- Nous avions toutes les raisons d'en douter
- Vous parlez de vous à la 1ère personne du pluriel maintenant ?
- Juste pour faire concorder avec avions!
- Ca vole trop haut pour moi, votre détournement conjugal m'exaspère
- Là c'est vous qui débloquez, l'adjectif relatif à conjugaison n'est pas conjugal
- Vous me faites perdre mon latin avec votre baratin, puis vous digressez sans arrêt
- Je vais me censurer parce que je démarre au quart de tour, je pars comme une fusée et vous seriez médusé
- Allez-y au point où on en est
- Quand vous dites baratin et digresser, je pense à beurre et quand je pense à beurre...
- Alors là, bien que je ne sois pas vous, je ne vous suis pas du tout (cf conjugaison de suivre et être)
- Baratin m'évoque baratte, baratte, beurre et le beurre c'est pas vraiment fait pour digresser...
- Hou mais c'est plus grave que ce que je pensais! Et si je comprends bien, beurre devient beur et au moins vous allez pouvoir retourner au Bled
- Oui ça vaut mieux que le Bescherelle parce que là je pense à béchamel et on ne s'en sort plus. A part se retrouver dans le désert avec des chamelles et ainsi se rapprocher du Bled, dans lequel je vais me plonger pour réapprendre toute ma conjugalité!

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Happy birthday

Par Le 25/12/2020

Aujourd'hui je ne fête pas l'anniversaire de Jésus mais celui de mon blog.
10 ans déjà et des milliers de lecteurs à travers mon monde.
Tu es resté un ami fidèle même quand je t'ai laissé en jachère. Durant toutes ces années, tu as su me réconforter les soirs de doute, tu m'as accompagnée dans mon quotidien, guidée vers demain, appris de nouveaux mots. Tu es devenu ma boussole, ma météo.
Quand tu dis météo moi je dis enlève tes bas (ah ah ah). J'aime jouer avec toi, débloguer avec les mots, les détourner, les inventer, les métisser.
J'aime que mes billets racontent les petits riens de mes journées, ces petits riens mis bout à bout qui à la fin formeront un tout. Une vie au fil des saisons d'un jardin de mots. A la saint Catherine cette année,  j'ai planté un motivier, un néologier, deux ou trois phrasiers et bien évidemment des dizaines de poémiers. J'ai hâte d'être au printemps pour voir fleurir tout ce vocabulaire, cueillir tous ces fruits, les faire racacuire dans un chaudron en cuivre, les édulcorer s'ils sont trop salés et les conserver dans un nouveau dictionnaire.
En attendant, souffle bien tes bougies mais n'éteins pas cette lueur sur mon écran, tu es ma lumière divine, mon vin de messe si doux à boire dans un ciboire. Non le ciboire c'est pour les hosties, c'est Jésus himself qui me l'a dit (impossible de lui clouer le bec à celui-là). Et si lui n'est pas revenu (impossible de savoir où il crèche) moi j'y reviens toujours, quelle croix!
Alors bon anniversaire à vous deux, je ne voudrais pas faire de jaloux.
Si un jour j'ai autant de fidèles que lui, j'en serais ravie (mais des fidèles j'en n'ai pas trop eus!)

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Noël

Par Le 23/12/2020

Aujourd'hui j'ai préparé une sauce madère, elle est devenue madeleine de Proust. Ils sont pourtant bien loin les Noël de l'enfance.
Que signifie cette fête quand on ne croit pas plus au père qu'au fils encore moins au saint esprit? Pourquoi célébrer la naissance de quelqu'un qui n'est peut-être pas né? (non je ne ferai pas le coup du poisson, pas question). Pourtant question il y a. Mais ne serait-il pas temps d'expérimenter l'époché? Cesser d'émettre un jugement sans douter de la réalité du monde?  Si Husserl me donnait un cours particulier, je lui en saurais gré et ne resterais pas de marbre. Pour le moment il ne brille que par son absence et cette faible lueur ne suffit pas à éclairer ma lanterne sur le concept.
Bref, je mettrai le jour de Noël entre parenthèses, une robe à paillettes, du noir aux yeux, du rouge aux lèvres et j'irai chanter "Jésus reviens parmi les tiens" à la messe de minuit. Par ces temps incertains on aurait bien besoin d'un prophète pour nous montrer le chemin.

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Epoché

Par Le 21/12/2020

Au détour de chemins philosophiques par ondes hertziennes, j'entendis un mot inconnu à mes oreilles, tout autant qu'à ma science, ma conscience, mon inconscience, voire mon inconsistance. Je ne compris pas un traître mot (oui vous êtes traîtres parfois) de sa définition ce qui me plongea dans un marasme sans précédent (il était parti à la pêche, précédent). Comme je m'étais déjà rendue à l'évidence(cf post précédent justement) je n'y revins pas , mais dus me résoudre à contempler l'étendue de mon ignorance.

"Chez Husserl (qui, lui, s'oppose explicitement au scepticisme, et adopte cependant ce terme) et dans la phénoménologie, l'épochè désigne la mise en suspens de la thèse naturelle du monde, c'est-à-dire la croyance à la réalité extérieure du monde. Mais il ne s'agit pas du tout de douter de la réalité du monde. Cette mise entre parenthèses a pour but de ne laisser que le phénomène du monde, qui est une pure apparition, et qui n'affirme plus la réalité de la chose apparaissant." Wikipédia

La seule chose qui me soit familière c'est la mise entre parenthèses dont j'use et abuse, pour le reste le concept me paraît totalement abscons (je ne ferai pas de parenthèse sur ce mot bien qu'il y ait matière).
Je vais aller me faire cuire des oeufs, peut-être les pocher et réfléchir à qui de la poule ou de l'oeuf...y' a des jours où je m'auto donne mal à la tête...

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Evidence

Par Le 21/12/2020

Je me suis rendue à l'évidence, n'ayant rien trouvé, je suis revenue à pied
J'ai perdu connaissances, impossible de me rappeler toutes les leçons étudiées
Je n'y suis pas allée par quatre chemins, un seul menait à la bonne destination
Je me suis penchée sur la question, désaxée par la force d'attraction
Je suis tombée de Charybde en Scylla, dans un cri d'effraie ou d'effroi
J'ai ensuite caressé l'espoir et son fallacieux velours noir
J'ai cherché midi à quatorze heures dans un élan prometteur
J'ai tiré le diable par la queue pour m'étourdir un peu
J'ai fini par prendre une douche écossaise pour calmer le malaise
J'ai filé à l'anglaise un bien mauvais coton
J'ai pris la clé des champs, je connaissais la chanson
J'ai parlé à coeur ouvert, mon sang n'a fait qu'un tour
J'ai dû le recoudre de fil blanc au grand jour

Je me suis finalement lassée de ces supercheries
J'ai profité d'une douce pluie, un grain de folie
Et je suis partie vivre en théorie



 

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Lagune

Par Le 19/12/2020

J'ai des lacunes
Sur la lagune
Allongée

Oubliés
Ton nom ta voix
Tes bras autour de moi

J'ai des lacunes
Du haut des dunes
Je vois

Le crépuscule
D'un feu de paille
Dans les oyats

J'ai des lacunes
Sous le clair de lune
Je ne me souviens pas

De la question
De nos émois
Et toi ?

J'ai des lacune
s
Face à Neptune
Une nuit troublée

Sable mouillé
Chacun cherche
Sa chacune


Dans l'air iodé
J'ai des lacunes

Sur la lagune

Allongée...

 

 

 








 

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Amilie

Par Le 16/12/2020

Nous nous sommes reconnues au milieu de tant d'autres humains perdus, hasard des jours et des routes. Mains tendues au-dessus du vide, l'été devenait aride. Une année paire, ses impératifs, ses impairs. Premières discussions dans les volutes de substances délétères, abattues mais candides, nous refaisions le monde pour qu'il nous semble plus doux, pour survivre malgré tout.
L'automne et ses feuilles mortes, l'hiver et ses flocons, des soirées mémorables autour d'un pont de pierre, des fous rires assumés au cinéma Gaumont, une production US en VF, le bruit des papiers de bonbon !
Puis des films en VO, de la danse coréenne, des airs d'accordéon, des poèmes, des fauteuils rouges au balcon, des frissons.
Des tasses de thé dans les salons, des ombres blanches dans les rayons, des coupes de champagne, des rendez-vous galants et filent les saisons.
Entre doutes et projets, nous avons poursuivi nos routes, en prenant soin de toujours les faire se croiser.
Les soirées claires d'été dans la maison de la famille, les jardins parfumés, les paniers bleus à partager, les nuits étoilées à rêver à tous les possibles.
Au rythme de nos insatisfactions, de balades téléphoniques, de coups de coeur, de déceptions, nous cultivons au quotidien ces liens tissés comme une évidence parfois plus forts que ceux donnés par la naissance.
Et nos plaintes littéraires n'auront pas été vaines, car aujourd'hui enfin Emma Bova-rit!

 

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Belvédère

Par Le 14/12/2020

Je voudrais dormir à l'abri des belvédères
M'émerveiller de toutes les beautés de la terre

Réchauffer mes deux mains autour d'un thé fumant
En écoutant la folle musique du vent

Je voudrais rêver face aux sommets enneigés
M'abandonner à de voluptueuses pensées

Offrir mon visage au soleil automnal
En caressant du bout des doigts un idéal

Je voudrais m'alanguir sur un lit de bruyère
M'extasier de la nature et ses mystères

Sentir les parfums enivrants et sauvages
En savourant les doux fruits de ses rivages

Je m'étais assoupie sous un réverbère
Réveillée par les cris d'une pie en colère
Mon songe s'est envolé à tire-d'aile
Fut-il imaginaire ou fut-il bien réel


Somme-nous vraiment peu de chose ici-bas
Pour rester insensibles à ce panorama
Je voudrais m'endormir sur un belvédère
Et goûter de la vie ses plus tendres chimères









 

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Souvenir

Par Le 10/12/2020

Villegailh'heart

Dimanche 16 Novembre 2008 : Villegailhenc exposait ses arts et ses artistes : Villegailh'art

Après maintes hésitations, je m’inscris à la manifestation, mais très vite je panique à l’idée de ne pas être à la hauteur. A la hauteur de quoi ? De mes espérances peut-être ? Mon nom est déjà imprimé sur le papier, je ne vais pas me débiner.

Le samedi vers 17h, je suis au rendez-vous pour installer mes « œuvres », totalement néophyte dans l’art de suspendre un quelconque tableau sur un panneau d’affichage. Je n’ai rien prévu, ni crochet, ni décoration, puis je n’ai même pas fini ce que je voulais faire, ah la la, cela s’annonce mal ! Heureusement mes voisines de stand  me proposent spontanément leur aide. Ouf, je vais peut-être y arriver !
Je rentre chez moi et me remets au travail. Je ne veux pas décevoir ceux qui vont se déplacer, puis il y a le lieu. Ce n’est pas à Carcassonne, Paris, Londres, New York ou Tokyo ! C’est bien plus. C’est ici, dans le village de mon enfance, dans ce village où j’ai fait mes premiers pas, dit mes premiers mots, rencontré la poésie pour la première fois : c’était un après- midi d’automne sur le chemin de la Croix, les azeroliers et leurs mille petites pommes s’offraient à moi. Les vignes dans leur dernier manteau rouge et or de feuilles séchées me saluaient. Un vent froid venu du nord soufflait ou était-ce une brise légère ? Le ciel en camaïeu hésitait entre une tempête et une ondée passagère. Je garde en moi l’image de ce tableau mouvant et émouvant, un mélange paradoxal des quatre éléments. La terre fertile et craquelée sous mes pieds, l’air violent et doux à la fois, les feuilles incandescentes des vignes et l’eau en rafale sur mon visage émerveillé.
Et à toi, mon petit village devenu grand (tout comme moi) que vais-je offrir ?
Vais-je retranscrire cette émotion qui toujours vers toi m’a fait revenir ?
Je ne sais pas ce que je vais découvrir en osant m’exposer. Retrouverais-je mes rêves d’enfant ? Il n’est pas sage d’espérer autant !

Dimanche matin, 10h 25, je finis d’arranger mon décor.

Les premiers visiteurs arrivent, premières impressions d’inconnus, de proches, premiers échanges. Je découvre ou redécouvre certaines personnes. Je les regarde me regarder à travers mes poèmes entoilés. Je les regarde aussi s’exposer. J’observe les curieux, les gênés, les enthousiastes, les indifférents, les inconditionnels ! J’observe surtout cette assemblée « d’artistes » venus partager un moment de leur passion, de leur foi, de leur humanité.
Et miracle ! Je retrouve un bout d’azerolier sur une photo encadrée, plus loin c’est une croix au détour d’un chemin, un tableau aux couleurs de l’enfance…Des instants comme il n’en existe pas tant. Je pourrais fermer les yeux, sentir à nouveau le souffle du vent, les gouttes de pluie et l’odeur de la terre mouillée.Alors, je me sens soulagée.
J’ai bien fait de venir m’exposer, bien fait de passer le cap de cette réserve naturelle qui m’empêche souvent d’aller vers les autres.
J’ai aimé les sourires sur les visages amis, j’ai aimé les regards bienveillants, j’ai aimé les mains tendues. J’ai aimé ce dimanche, moi qui en temps normal déteste ce jour.
Mon petit village m’a donné la foi de continuer, continuer à dire, à écrire, à partager. Continuer à transmettre le savoir, les idées, se souvenir du passé pour pouvoir serein avancer vers l’avenir, s’ouvrir au monde en sachant d’où l’on vient.
N’est-il pas sage d’espérer autant ?

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Solange

Par Le 06/12/2020

Solange la mésange me rend visite tous les matins et tous les matins nous devisons de la nature du genre humain.
-Je vous trouve compliqués vous les humains
-Pourquoi dis-tu ça Solange?
-Ca fait quelques temps que je t'observe, toi et tes congénères et souvent j'ai l'impression que vous cherchez les problèmes au lieu des solutions...
-Un exemple en particulier?
- J'aurais des milliers d'exemples mais je n'aime pas divulguer les secrets. Si tu savais tout ce que je vois à travers les vitres...
- Ah oui, tu dois en voir des vertes et des pas mûres!
- Tiens, prends cette expression, pourquoi utiliser une négation quand verte signifie déjà pas mûre
- C'est une figure de style...mais tu as raison, la langue française est très alambiquée
-Si les mots étaient plus simples, vos vies le seraient peut-être aussi. En même temps j'aime les mots, alambiqué me fait voyager, je m'imagine  virevoltant dans un toboggan en cuivre géant. Les mots alambiqués doivent ressembler à des tire-bouchons...
- Solange, tu en as de l'imagination, même moi je n'aurais pas pensé à tout ça et pourtant dieu sait...
- Ah tiens parlons-en de celui-là! J'ai entendu dire que vous appeliez des papes Pie. Avez-vous déjà vu des animaux bâtir des cathédrales pour honorer une hypothétique entité supérieure? Y'a pas pis comme idée.
- T'es vache envers les hominidés!
-Ah ah ah, avec toi au moins je me marre (et ne me ressors le coup du canard, tu l'as déjà fait)
- Le cou du canard c'est meilleur farci

-Beurk! A propos merci pour le bonbon de graines, il est délicieux
- Ravie de te faire plaisir
- Bon c'est pas tout mais j'ai de l'air à fendre moi!
-A demain Solange, bon vent !

Dans 2020

Corps vidé

Par Le 05/12/2020

Un sac plastique échoué sur un arbre se prend pour un oiseau. Un sac plastique noir échoué sur un arbre mort se prend pour un corbeau. Puis le vent l'emporte, le déchire, il n'est plus que lambeaux. Les corbeaux de plume rient de leur rire sarcastique. Ils attendent le dernier souffle des vies. Ils guettent sans daigner tuer. Pure perte d'énergie, la vie s'en charge très bien.
Quel délice cette chair gorgée de mort, ce goût unique de l'irréparable. Les corbeaux végétariens ne survivent pas et les vaches carnivores deviennent folles. Narcisse a chu dans la mare.Et Sisyphe se marre du haut de son rocher (au fait, quand est-ce qu'il mange?). Pas un pour rattraper l'autre.

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Thème

Par Le 04/12/2020

J'aime les trous du gruyère
Et les quatre coins des petit-beurres
J'aime ce qui a le goût d'hier et les heures de l'hiver

J'aime les points de suspension
Les parenthèses et les questions
J'aime la nostalgie des airs d'accordéon

J'aime la crème de marron les chocolats chauds
Et le son des vieux pianos
J'aime la pluie dégoulinant sur les carreaux

J'aime le crépitement du feu
Et le souffle d'un vent fougueux
J'aime la flamme au fond de tes yeux

J'aimais les trous du gruyère
Et les quatre coins des petits-beurres
J'aimais les heures de l'hiver

Mais aujourd'hui je préfère
Le plein au creux
Les ciels lumineux

Et cette flamme qui éclaire
Un regard bleu
Au fond de tes yeux

 

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Haïku

Par Le 03/12/2020

Décembre neige
Un froid gris sur la plaine
Blanc privilège

Dans 2020

Fil amant

Par Le 01/12/2020

Donc la pelote de laine, reprendre le fil, ne pas aller bêler avec le troupeau, se regarder dans la glace et se trouver beau (parce que ça rime). Avec le fil recoudre les boutons, éviter d'ajouter des pressions. Un crochet, une parenthèse (encore!), un uppercut, de la dentelle, les mots se brodent sur le canevas du temps. Rentrer dans son cocon, tisser des vers à soi et les offrir à d'autres, à des inconnus sur la toile quand les impudeurs se dévoilent, que les dessus laissent entrevoir les dessous. Et là Monsieur Devos apparaît, maître du non-sens, puisque sans dessus dessous ou vice-versa sans dans le vice verser. Je crois en lui puisqu'il existe, il s'appelle Raymond, quand l'autre n'a ni nom ni prénom. Qui s'est déjà posé la question du nom de Dieu? La suite demain, j'ai de l'huile sur le feu...

Dans 2020

Post-scriptum

Par Le 30/11/2020

J'ai enfin compris pourquoi il faut imaginer Sisyphe heureux et remarqué que la lune se levait à l'est et se couchait à l'ouest. Ca fait beaucoup pour une seule journée. Et ce matin j'ai eu envie d'une tartine de pain beurrée avec du cacao en poudre dessus.

Dans 2020

Sur le fil

Par Le 30/11/2020

Certains jours, je ne parviens pas à dérouler le fil de mes pensées décousues, à broder quelques lignes. Les mots restent noués, une pelote de mots emmêlés, juste à côté du champ lexical du vide...Waterloo morne plaine...un champ stérile, certes il ne produit rien mais a l'avantage de ne pas être infecté. Et voilà quand ils ressortent, c'est en vrac, ils ne se dévident pas par ordre alphabétique, par noms communs ou propres, tiens justement , les noms propres poussent dans les champs stériles forcément. Ils se bousculent au portillon, à la porte tambour de ma boîte crânienne. Il est impératif d'y mettre de l'ordre (bien que la phrase soit à l'indicatif) sous peine de chaos (je fais une parenthèse sur les parenthèses dont l'usage intempestif n'est pas recommandé en littérature, ça tombe bien j'en fais pas et les parenthèses j'aime ça. Elle sont un digression dans la continuité, une bulle d'air frais, un soupir. Elles sont la fleur au bord du chemin, la possibilité d'aller plus loin, ne les dit-on pas enchantées parfois?)
Revenons donc à nos brebis (parité oblige), sont-elles au champ elles aussi? Des brebis vient la laine et de la laine on fait des pelotes, ah le voilà le fil. Je vous tiens en haleine, isnt'it?

Dans 2020

La petite voix

Par Le 29/11/2020

Elle revient la petite voix de derrière la tête, celle qui se cache là dans le creux de l'oreiller, qui vient parfois me réveiller. Elle me susurre des mots doux, des mots de rien du tout, des mots qui finissent en -isse, comme ces canisses en bambou, les amis dessous, le ciel à la verticale, le soleil ou les étoiles, les tables pleines, les enfants qui jouent.
Et la petite voix repart sur les plumes de Solange la mésange, pourquoi ne s'appellerait-elle pas Solange ?
Et puis la petite voix des mots des autres, des vers glanés au hasard des lectures, qui restent dans un coin, dont on ne sait plus ni le début, ni la fin, ni le nom de l'auteur. D'un clic magique je retrouve le poème, certain l'attribue à Fernando Pessoa.Peu m'importe, chapeau bas à son auteur quel qu'il soit.

De tout il restera trois choses :
La certitude que tout était en train
De commencer ;
La certitude qu’il fallait continuer,
La certitude que cela serait interrompu
Avant que d’être terminé.
Faire de l’interruption un nouveau chemin,
Faire de la chute un pas de danse,
Faire de la peur, un escalier,
Du rêve, un pont,
De la recherche…
Une rencontre

Poème de Fernando Sabino, poète brésilien extrait de "O encontro marcado" (Le rendez-vous convenu)

Je vais pouvoir aller dormir tranquille avec ma petite voix de derrière la tête, confortablement lovée dans le creux de l'oreiller

Dans 2020

Lendemain

Par Le 28/11/2020

Le temps dégouline, mais l'heure finit par tourner aux montres molles de l'éternité. Et le jour remplace la nuit, et la nuit remplace le jour. Pourtant, il est en des plus lourdes, qui restent figées à la grande horloge.
Hier têtes blondes joyeuses, les mains ouvertes sur un avenir plein de possibles.
Aujourd'hui regards graves et humides et le futur en pointillé.
Un éclair, une déchirure dans les certitudes existentielles, plus tard devient incertain, demain n'aura plus jamais le goût de l'enfance, de cette indispensable saveur d'insouciance.
Le monde devient triste comme un dimanche de novembre.
Où trouver l'arc-en-ciel, où trouver la lumière ?
Des heures plus lourdes que d'autres, nos doutes et nos larmes, nos souvenirs et nos espoirs. Et nos mains, oui nos mains, nos lendemains et surtout les tiens...qu'ils chantent et t'enchantent...

Dans 2020

Deux mains

Par Le 25/11/2020

Parfois le ciel nous tombe sur la tête, par temps clair, sans crier gare. La ronde folle des heures suspend sa course. Ne reste que l'horreur d'une réalité blafarde. L'après ne sera jamais plus comme l'avant. L'insouciance des sourires blonds et des doigts potelés laisse place à la gravité des regards. L'absurdité de notre condition nous engloutit, misérables amas de particules, nous agitant sans cesse autour de quelques chimères.
Nous sommes seuls face au vide, pourtant, regarde ma main, elle vient vers toi. Elle te caresse de sa paume sereine, elle te serre tendrement, elle te dit ce que les mots ne peuvent exprimer, elle voudrait te servir de guide et d'appui pour arpenter les chemins sinueux de l'avenir. Ce ne sera pas une promenade du dimanche au chaud soleil de garrigue ou à l'ombre des sous-bois. Il y aura les questions, la colère, l'incompréhension, la sidération. Il y aura les jours d'espoir et leur contraire. Il y aura les pleurs et les yeux humides étouffant les sanglots.
Ma main restera là, elle ne tremblera pas. Elle est cette petite surface de contact entre deux êtres, un infime morceau d'humanité. Elle est mouvement quand tout se fige autour, elle est geste pour essuyer les larmes, elle est signe pour aller plus loin.
Pas de destin, pas de sens qui précède l'existence, juste nos mains d'être humain tendues vers demain

Dans 2020

Subjectivité

Par Le 23/11/2020

Mon nouvel objectif est de faire de la photo...le canard revient et bien sûr je me marre, puis il repart en jouant du pipeau.
Jean-Sol s'invite dans le cadre, la duchesse de Bovouard flâne en arrière-plan.
Dans un souffle d'inspiration, j'ouvre mon diaphragme. Un grand bol d'air et une tasse de thé noir. Plaisir fugace, puisque tout passe. Zoom avant sur les jours d'après.Temps de pose. Mise au point. Netteté.

Une photo monochrome, contraste, balance des blancs, grande profondeur de champ. Flou artistique sur les souvenirs, vue panoramique sur le présent. Point de fuite à l'horizon, vitesse d'obturation, sur-exposition. Du grain sur la photo, une averse dans le tableau, le canard s'est envolé, Jean-Sol et la duchesse en contre-plongée remontent la rivière en canoë. Il n'y a rien à comprendre, un vieux reflex que de jouer avec les mots...même derrière l'objectif d'un appareil photo...

Dans 2020

Tout conte fait

Par Le 19/11/2020

Vite vite,  un billet avant minuit, sinon je vais redevenir citrouille et faire fi de mes résolutions. Ensuite il faudra faire défiler tous les crapauds du canton pour trouver celui qui...ah mais non c'est pas cette histoire là, et je suis déjà en pyjama, j'ai enlevé mes pantoufles, me suis glissée dans un lit douillet sans petit pois pour y dormir cent ans, mais non pas tant. J'ai croqué la pomme rouge offerte par Adam ou par la sorcière d'un paradis artificiel, non, originel à moins que ce ne soit original.
Les mots se brouillent, ils deviennent flous, floués, floutés. J'en perds mon latin et sa montre à gousset.

Et j'ai fini par m'assoupir devant mon écran bleuté, faisant donc fi de mes résolutions puisque minuit avait sonné lorsque j'ai repris conscience. Je ne m'étais pas non plus transformée en citrouille, je ne dois finalement pas être une vraie princesse!

Dans 2020

Est-ce ainsi....

Par Le 17/11/2020

Le silence lance, l'instrument ment et les canards s'ébrouent dans la mare. Heureux hasard que canard rime avec mare. Il ne rime pourtant pas avec sucre ou couac, encore moins avec bivouac, surtout en ces temps de liberté barbelée où sortir au-delà du périmètre autorisé sans être attesté est passible d'une contravention même pour les impassibles, les habitants des impasses paisibles.Et même armé de son laisser-passer, il n'est pas sûr de pouvoir rêvasser en paix sur les chemins de campagne, un chien et son maître mal dressé, un deux roues motorisé. Le silence se remplit de fureur et de bruit, le ciel se fait menaçant et les mots tôt ou tard rouleront vers leur destinée, comme des soleils révolus...parce que je marchais sur la route d'Aragon...

(le confinement ne me réussit pas plus que les documentaires animaliers)

Dans 2020

L'oeil du tigre

Par Le 16/11/2020

Un tigre du Bengale avance à pas de loup guettant sa proie d'un oeil de lynx, une antilope nilgaut. La nigaude ne se méfie pas de ce prédateur, rusé comme un renard, malin comme un singe. Sa vision monochrome ne lui permet pas de détecter sa fourrure fauve à travers la végétation dense. Elle gambade, insouciante, crédule comme une oie blanche. Evidemment elle ne s'est pas encore faite dévorer, et ne pourra pas la fois prochaine se fier à son expérience puisqu'elle sera digérée. Un oiseau de mauvais augure traîne dans un ciel sans nuage, il plane sournoisement en quête d'une carcasse à picorer. Le félin ne compte cependant pas en laisser une miette, il a aussi en plus de son pas, une faim de loup, bien que le dernier boeuf ingéré lui soit resté sur la langue. Sa tigresse, jalouse comme il se doit, lui a fait jurer de ne rien révéler de leur nouvelle résolution.
Pendant ce temps, la nilgaute baye aux corneilles, se prélasse dans un rayon de soleil, joue dans les herbes folles. La vie lui semble simple et légère, elle n'est en proie à aucune inquiètude. Elle croise une grenouille coassante, qui bien entendu veut se faire aussi grosse que le bovidé sur la langue du tigre. Il est donc là, avec ses pas et sa faim de loup quand ses promesses lui reviennent en mémoire...devenir végétarien, pour un félin, quelle hérésie. Heureusement, un troupeau de steacks de tofu à poils ras passa par là, il n' y eût aucun survivant.
Le tigre tint ses engagements, l'oiseau de mauvais augure piaillant au complot s'en alla prêcher ses malédictions dans une autre contrée, et la gazelle nigault continua à n'être en proie qu'à la douceur de vivre.

(Ca ne me vaut rien de regarder des documentaires animaliers)

Dans 2020

Odeur de sainteté

Par Le 15/11/2020

L'inconscient est surprenant, certes ce n'est pas la révélation du jour, mais le mien vient de m'étonner fortement. J'avais tendance à le snober un peu, lui attribuant une mauvaise foi Jean-Sol Partrienne, mais là je dois rendre à Sigmund ce qui lui appartient.

Pour Jean-Sol l'individu ne trouvera pas la résolution de ses angoisses dans le passé mais dans son avenir. C'est son projet qui redonnera sens à sa vie, quand Sigmund va remuer le liquide amniotique pour en retirer la substantifique moelle à prix d'or.

Moi: bon mais Jean-Sol qu'en est-il des rêves, des lapsus, des actes manqués ? Ah tu ne réponds pas! Tu fais le mort, tu me ghostes ?

Sigmund: tu vois bien qu'il n'est pas capable de te répondre, il n'a pas d'explication.

Moi: il a peut-être un problème de réseau.

Sigmund: si tu veux j'ai le 06 de Lacan.

Jean-Sol : je refuse d'être mêlé à ce charabia populiste, je sors.

Moi: (je savais qu'il était susceptible), Jean-Sol n'oublie pas ton attestation!

Sigmund : bon maintenant qu'on est tranquille tu peux me parler de ton inconscient mon enfant

Moi: hé bien mon père...heu non je suis pas au confessionnal et je ne veux pas non plus le numéro d'Oedipe. Ça m'en donne des mots de tête toute cette histoire.

Je vais aller me coucher et rêver que mon jardin foisonne de fleurs en odeur de sainteté

Dans 2020

Bouquet de fleurs

Par Le 14/11/2020

Je reviens parfois désherber quelques soucis dans ce jardin à l'abandon, je retrouve mes mots et m'émeus moi-même, sans faire l'autruche. Oui vous savez ou tu sais lecteur si tu permets le "tu"que je ne me laisse jamais aller à la facilité. Je suis d'une rigueur et d'une subtilité absolues! Jamais je ne procrastine, je mène à bien tous mes projets en temps et en heure, utilisant toujours le mot juste, la ponctuation adéquate, le verbe haut, la formule choisie. Si bien que quand je me relis, je m'épate. Et toi lecteur à l'esprit si vif, tu devines illico mon menu du soir. N'est-ce-pas un peu trop lourd pour un dîner? Non, je les prépare en soupe puisqu'il s'agit évidemment d'un alphabet. Je me nourris de lettres et ne boit que du T. Lors de mes balades, grapille D B parce que telle LN, je les M...Je ne vais pas pousser l'autosatisfaction jusqu'à me citer, certain y verrait un ego surdimensionné, ceux qui me connaissent bien savent que C le K, mais je le gère tellement bien qu'on n'y voit que du F

...et dans l'herbe tendre du jardin
Loin des sourires railleurs
A l'abri du vent marin
Tout doucement , je m'envoie des fleurs !

Oui finalement je m'autocite et me félicite!

Dans 2020

Atelier d'écriture confiné

Par Le 03/05/2020

Nuages de mots atelier ecriture

 

Atelier d'écriture en visioconférence d'après une photo de Karine Lhémn en exposition virtuelle aux muséee des Essarts à Bram  http://www.satellite.essars.fr
. Je n'ai pas la photo, il s'agit d'une variation sur la naissance de Vénus de Boticelli. La photo est un tryptique représentant une jeune femme nue ou drapée sur une plage.

La consigne était que chaque participant choisisse 3 mots puis s'inspire de tous les mots récoltés pour écrire son propre texte en vers ou en prose
 

Vénus beauté

 

Sur les rivages de la mer Égée
Vision de la beauté
Enchantement

Le bruit du vent
Multiples nuances de bleu

Je ferme les yeux

Sur les rivages de la mer Égée
Inspiration dans l'air iodé
Une femme nue

Offerte aux alizées
Une inconnue
Drapée de volupté

Sur les rivages de la mer Égée
Apparition sur les galets
D'un fantôme une illusion ?

Un goût amer du passé
Lutte acharnée contre les démons

Je regarde l'horizon

Dans les embruns de la mer Égée
Je plonge dans l'eau salée
Et j'avance sans pudeur

Une trêve dans la douleur
Vivre ses rêves sans censure

Puisque vraiment rien ne dure

 

 

 

 

Dans 2020

Atelier écriture 2

Par Le 29/04/2020

Cite lune

Choisir une image d'un paysage, décrire ce que l'on voit de la fenêtre de l'endoit où l'on se trouve. Ecrire ensuite le texte en éludant une voyelle au choix (lipogramme)

 

 

Mon cher Viktor,

 

Je vous écris du milieu de la nuit, depuis cette chambre austère où j'ai malencontreusement échoué, dans une ville étrangère aux allures médiévales.

Tout avait pourtant bien commencé. Les tableaux étaient parvenus à destination sans encombre, les formulaires dûment estampillés par les sbires de l'Autorité, l'organisation pour une fois était parfaite, jusqu'à...

Oh Viktor, ce que je vois depuis la fenêtre de mon taudis me saisis d'une vive émotion. Le ciel vient de se dévoiler et laisse apparaître un disque lumineux aux dimensions irréelles. Je suis aimantée par tant de splendeur. Comme je voudrais partager cet instant avec vous, vous que je n'ai fait qu'effleurer et qui pourtant emplissait chacune de mes pensées.

Viktor, cet énorme ballon dans le ciel déchiré de nuages noirs semble vouloir éclairer notre ignorance et nos graves manquements à l'égard de la planète dont nous sommes locataires. Le spectacle est saisissant. Les vieilles pierres, imposantes, intactes depuis des millénaires apportent une solennité, une puissance surnaturelle à l'ensemble du tableau. Les flèches des toits d'ardoise semblent transpercer les nuages.Je tremble de tant de grâce. Je voudrais sortir, respirer l'air autrefois si pur, courir sur ce chemin pavé, courir pour rattraper le temps, courir à en perdre mon souffle et enfin vous apercevoir dans la lumière de cet étrange phénomène.

Je ne sais quel sera notre avenir, si seulement nous en aurons un mais je veux espérer qu'il soit avec vous et qu'il nous soit donné d'avoir chaque jour une aussi belle représentation de la beauté.

Viktor, une révolution se prépare, j'ai peur, je suis seule et vous êtes si loin. L'Autorité m'a confisqué mon phonephoto, je ne peux ni vous contacter ni figer cette vision. On me prendrait pour une folle si j'en parlais à quiconque, vous seul pourriez me croire.

Je vais tenter de contourner le système et d'envoyer cette missive par les canaux secrets. Venez me chercher, vous êtes mon seul espoir.

 

Svetlana

 

 

Lipogramme en I

 

Mon cher Vyctor,

 

Je m'épanche auprès de vous du plus profond des ténèbres, une chambre austère, malencontreux refuge dans un bourg aux allures moyenâgeuses.

Tout fut excellent dès le départ: tableaux parvenus à bon port sans encombre, accords frappés du sceau de la Royauté, plan exécuté sans lacune, jusqu'à...

Vyctor, je regarde par la fenêtre de ma mansarde et le spectacle me tourmente fortement. Dans la voûte céleste se découpe un énorme cercle jaune surnaturel. Ah, vous espérer à mes côtés et partager ce moment avec vous, vous dans la souvenance d'un effleurement, dans mes pensées à chaque seconde.

Vyctor, cet énorme ballon au centre d'une sombre atmosphère semble nous montrer nos graves manquements, nos erreurs à l'égard de la planète dont nous sommes les hôtes pour un temps donné. Le spectacle est fabuleux. Les murs ancestraux, solennels apportent une force au tableau, comme une vue de l'au-delà. Les flèches des tours semblent transpercer les nuages. Je tremble de tant de grâce. Je veux m'élancer sur les pavés, gonfler mes poumons d'oxygène naguère d'une pureté absolue, avancer à toute allure pour rattraper le temps, perdre mon souffle et vous penser présent, là debout dans la clarté de cet étrange phénomène.

Quel sera notre futur, en aurons-nous un ? Je veux l’espérer avec vous pour contempler une telle beauté chaque jour.

Vyctor, un bouleversement se prépare, la peur me submerge, votre absence est lourde à porter.

La Royauté m'a volé mon phonephoto, je ne peux vous contacter ou garder une preuve de ce panorama. Pourvu qu'on ne me prenne pas pour une folle, vous vous serez persuadé du fondement de mes propos, n'est-ce-pas ?

Je tente de contourner le système et d'envoyer cette lettre par les canaux secrets.

Venez me chercher, vous êtes ma seule espérance.

 

Svetlana

 

 

 

 

 

Dans 2020

Atelier écriture 3

Par Le 29/04/2020

Consigne de l'atelier d'écriture: décrivez le vol d'une oeuvre d'art que vous aimeriez avoir chez vous

 

 

-Marcel, ça y est tu peux sortir, ils sont tous partis. Y'a plus que nous maintenant, nous et eux, là quelques mètres au-dessus. Tu te rends comptes Marcel: on y est, on est là où je rêvais d'être depuis toutes ces années. Je t'ai déjà raconté ma première rencontre avec eux?

-Oui un demi-million de fois au moins. T'étais avec ta marraine, une femme douce et généreuse autant que ta mère était avare et revêche...

-Oui c'est ça Marcel, si tu l'avais connu, quand elle me donnait la main j'avais l'impression de caresser un nuage

-Bon Georges je sais que tu es un poète mais tu crois pas qu'on a du pain sur la planche

-Si bien sûr, on y va, tiens attrape les piolets, les cordes et le laser, t'as bien repéré tous les points d'ancrage

-Ouais c'est nickel j'ai mis mes lunettes infrarouge, c'est parti mon kiki, je t'ouvre la voie 

-Si Mamita me voyait, je crois qu'elle serait fière de moi, son rêve le plus secret aurait été de vivre au milieu d'eux. Tu sais qu'elle venait tous les dimanches leur rendre visite, ils étaient sa vie, sa famille, ses amis. Ils la consolait de la médiocrité et de la laideur de son existence

-On a une œuvre de 200 mètres carré à faire s'évaporer dans la nature et Monsieur cause philosophie, tiens je te lance la corde, double nœud et fais rouler Simone, ascension jusqu'au 7ème ciel. Mouvements légers, précis, pas de gestes brusques, tu deviens un félin prêt à bondir sur sa proie, prestance et célérité !

-T'en connais des mots mon Marcello.Mais t'inquiète pas ça fait 7826 jours que je m'entraîne, je peux refaire ce parcours les yeux fermés dans le noir absolu

-Allez plus que 2 mètres.Waouh ! Waouh ! Non mais tu vois ça mon Marcel

-Hé y serait aveugle si y voyait pas !

-Presque je remettrais en question la non existence de Dieu

-Et y recommence à philosopher, tiens prends plutôt le découpeur laser, il vaudrait mieux ne pas traîner ici trop longtemps

-Tu as raison. Je sens que la main de Mamita me guide et veille sur moi, je ne tremble même pas. Oh regarde ces couleurs et ces formes informes. Par ici les petits, je vais pouvoir passer le restant de mes jours à plonger mon regard dans vos reflets sombres et envoûtants

-Georges, fais gaffe t'as failli décrocher, bon sang concentre toi, j'ai pas envie de retourner au trou moi

-Moi non plus mais ton plan est tellement parfait, t'es un génie mon Marcel

-Bon maintenant, je déclenche l'alarme incendie, tu as 6 minutes pour te changer, rouler les toiles dans les tuyaux et cacher tout le matériel.

 

Une du Parisien mercredi 1er Avril, cambriolage spectaculaire au musée de l'Orangerie, un gang de malfaiteurs s'est emparé de la pièce maîtresse de la collection , Les Nymphéas de Monet, chef d'œuvre de l'impressionnisme d'une valeur inestimable aux dimensions extraordinaires. Selon la police, seul le crime organisé peut être à l'origine d' un cambriolage d'une telle envergure.

 

Un peu plus loin en banlieue :

-Je suis heureux Marcel

-Moi aussi Georges, le petit Picasso que j'ai pris au passage va m'assurer une retraite confortable

 

 

 

 

 

 

Dans 2020

Atelier d'écriture

Par Le 24/03/2020

J'ai participé à un atelier d'écriture en ligne, voilà les consignes et le résultat :


Je vous propose un logorallye
✍️Ce petit jeu consiste à écrire en introduisant dans le texte les mots d'une liste établie.
Je vous invite donc à écrire un texte qui commencera par la phrase suivante :
«Ils avaient annoncé des orages pour la fin de la journée, mais le ciel restait bleu et le vent était tombé»
et se terminera pas la phrase suivante :
«Il avait un air de bout du monde cet homme-là».
Entre les deux, vous devrez donc introduire à votre texte les 10 mots suivants dans l’ordre que vous voudrez (et merci pour vos suggestions!) :
Coquelicot / Prévision / Poisson rouge / Meurtrier / Éplucher / Big Bang / Missive / Sabre-laser / Métissé / Rafistoler
Les noms et adjectifs peuvent être mis au féminin ou au pluriel selon ce qui vous arrange, et les verbes pourront être conjugués.
 

Ils avaient annoncé des orages pour la fin de la journée, mais le ciel restait bleu et le vent était tombé. Cependant l'air devenait lourd et l'ambiance pesante. Marianne flânait dans le jardin, elle errait entre les doutes et la certitude que sa journée à l'image de sa vie serait un gâchis. Elle ne faisait et ne ressentait rien à moitié. Si elle s'ennuyait une heure, son existence entière était vouée à l'échec. Et puis c'était dimanche, elle détestait les dimanches. Tous sans exception. Même si elle avait passé un bon moment, l'évocation de ce jour finissait par anéantir son plaisir.

Un poisson rouge tournoyait dans la mare. « C'est tout moi ça » pensa-t-elle, «  je tourne en rond, je tourne en rond et je ne fais jamais rien de bon. Quel est le but ? Pourquoi le Big Bang, pourquoi ce coquelicot est-il rouge ? Il aurait pu être bleu ou vert. Non, dans coquelicot on devine le rouge. « Bien sûr parce qu'on est conditionné » sa petite voix lui parlait souvent, elle peinait à la faire taire. « Je maintiens que le mot coquelicot implique une notion de rouge,la structure du mot, sa musicalité, le rouge précède le coquelicot comme l'existence précède l'essence» Bon là elle n'était plus très sûre. Elle aimait élaborer des théories oiseuses sur tout et son contraire, construire des phrases alambiquées dont elle oubliait la signification. Elle sourit. Une bonne dose d'autodérision lui évitait finalement de sombrer dans le désespoir «  il faut imaginer Sisyphe heureux, on ne peut qu'imaginer un coquelicot rouge, CQFD. »

« Mais tu ne démontres rien du tout, tu débloques complètement ma pauvre fille »

« Chut ! » elle fit taire sa petite voix et continua sa déambulation. Elle salua son voisin qui s'entraînait intensivement pour le championnat du monde de sabre-laser, une nouvelle discipline, un sport métissé entre escrime et arts martiaux. Il lui répondit d'un hochement de tête. Elle eût envie d'entamer une conversation, un sentiment de solitude aigu s'abattit sur elle.

« Depuis combien de temps je n'ai pas parlé à un autre humain ? » Pour une fois sa petite voix se fit discrète. Elle s'arrêta sous le pin parasol et s'assit sur le vieux banc en bois rafistolé. Elle y avait oublié le journal de la veille. Elle le déplia machinalement. Elle se rappela sa grand-mère qui épluchait la rubrique nécrologique tous les matins. L'été avait été meurtrier et la liste était encore longue aujourd'hui. Dans une missive adressée à ses administrés,le chef du canton incitait à la prudence.

« Ce journal m'ennuie et me déprime, même les prévisions météo sont fausses, je vais résilier mon abonnement ». Elle observa son voisin attentivement. Il fendait l'air avec agilité dans sa panoplie de samouraï futuriste. Il était de taille moyenne,1m 72 environ, cheveux noirs et raides, yeux bridés, il avait réussi à fuir son pays avant la date fatidique. Il avait un air de bout du monde cet homme-là.

Dans 2020

Les illusions perdues

Par Le 17/03/2020

Je viens d'avoir une fausse joie, j'ai vu clignoter la rubrique messagerie de mon site depuis longtemps désertés (mon site et sa messagerie). Je me suis dit qu'un autre humain avait lu mes écrits, s'y était suffisamment attardé pour éprouver l'envie de laisser un commentaire, d'émettre un avis, de m'envoyer un petit mot doux. Point du tout. C'était un message par robot généré !!! Bouh, je fus triste tout d'un coup. Moi qui pensais pouvoir communiquer avec toi lecteur mon semblable, mon frère, qu'elle ne fut pas ma déception!Pas le moindre petit mot à se mettre sous la dent. Alors ceux des autres (de mots) quand il fait sommeil dans les chaumières et que demain il faut se lever tôt malgré le confinement pour aller au boulot. A très bientôt

Charles BAUDELAIRE 1821 - 1867        Au lecteur

La sottise, l'erreur, le péché, la lésine,
Occupent nos esprits et travaillent nos corps,
Et nous alimentons nos aimables remords,
Comme les mendiants nourrissent leur vermine.

Nos péchés sont têtus, nos repentirs sont lâches ;
Nous nous faisons payer grassement nos aveux,
Et nous rentrons gaiement dans le chemin bourbeux,
Croyant par de vils pleurs laver toutes nos taches.

Sur l'oreiller du mal c'est Satan Trismégiste
Qui berce longuement notre esprit enchanté,
Et le riche métal de notre volonté
Est tout vaporisé par ce savant chimiste.

C'est le Diable qui tient les fils qui nous remuent !
Aux objets répugnants nous trouvons des appas ;
Chaque jour vers l'Enfer nous descendons d'un pas,
Sans horreur, à travers des ténèbres qui puent.

Ainsi qu'un débauché pauvre qui baise et mange
Le sein martyrisé d'une antique catin,
Nous volons au passage un plaisir clandestin
Que nous pressons bien fort comme une vieille orange.

Serré, fourmillant, comme un million d'helminthes,
Dans nos cerveaux ribote un peuple de Démons,
Et, quand nous respirons,
la Mort dans nos poumons

Descend, fleuve invisible, avec de sourdes plaintes.
Si le viol, le poison, le poignard, l'incendie,
N'ont pas encor brodé de leurs plaisants dessins
Le canevas banal de nos piteux destins,

C'est que notre âme, hélas ! n'est pas assez hardie.
Mais parmi les chacals, les panthères, les lices,
Les singes, les scorpions, les vautours, les serpents,
Les monstres glapissants, hurlants, grognants, rampants,

Dans la ménagerie infâme de nos vices,
Il en est un plus laid, plus méchant, plus immonde !
Quoiqu'il ne pousse ni grands gestes ni grands cris,
Il ferait volontiers de la terre un débris
Et dans un bâillement avalerait le monde ;

C'est l'Ennui ! - l'oeil chargé d'un pleur involontaire,
Il rêve d'échafauds en fumant son houka.
Tu le connais, lecteur, ce monstre délicat, -
Hypocrite lecteur, - mon semblable, - mon frère !

Dans 2020

On ira tous au paradis

Par Le 16/03/2020

Premier jour de confinement, enfin presque. Ce matin je suis allée voter, acheter du pain et chercher le poulet rôti commandé la veille à la supérette du village. Il a fait des envieux, des clients qui revenaient bredouilles de l'hypermarché le plus proche, ils lorgnaient sur mon poulet, les yeux exorbités, la langue pendante comme le loup de Tex Avery devant une pin-up. Faut dire que je l'avais choisi sans grippe aviaire, j'avais aussi pris du lait de vache pas folle du tout, de la salade sans pesticide, des radis sans OGM. De quoi nourrir les asticots avec du bon et du bio quand la cloche sonnera. Drelin drelin, départ du dernier train, ah on a encore droit aux transports en commun, oui oui en plus pour le paradis c'est gratuit. C'est la moindre des choses, mais alors ça veut dire que je vais au paradis, comment ça se fait je crois en rien ? Ben c'est Lui qui l'a décidé. Mais Lui il n'existe pas, je sais c'est Lui même qui me l'a dit. Il m'est apparu un soir et il m'a dit cela fait 2000 ans que des humains croient en moi, je ne sais pas pourquoi parce que je n'existe pas, je ne suis qu'une légende. J'étais bien embêtée quand il m'a fait ces révélations, moi j'en étais déjà convaincue, les autres ne m'ont pas crue. Donc j'irais au paradis, et faut vivre une éternité là-haut ? Parce que vraiment le temps imparti ici-bas moi ça me suffit, le paradis , avec que des gentils, pas sûr que ça me corresponde, j'ai eu ma période Petite Maison dans la Prairie mais maintenant je préfère les Sons of Anarchy. La famille Ingalls pour l'éternité, quel enfer ! Et si on connaissait la date de sortie, que ferait-on du sursis ? Je crois que je ne changerais finalement pas grand chose. Peut-être que je me remettrais à fumer, juste pour le plaisir d'entendre la cigarette se consumer, ce discret crépitement seulement perceptible dans le silence et dans le noir. J'écrirais davantage, je finirais mes collages puis je ferais du ménage, j'aime bien laisser la maison propre avant de partir. Ensuite pas de tralala, une boite en carton recyclé, bien évidemment pas de curé, quelques poésies, deux trois chansons et fin de la plaisanterie.C'est comme ça, la mort fait partie de la vie.

Dans 2020

Walkman et coïncidence

Par Le 08/03/2020

Ecran blanc. Il faut le nourrir tous les jours, trouver un thème, choisir les mots, en dire un peu mais pas trop.
Hier soir, de la musique et des mots, des vibrations, des émotions, des souvenirs adolescents, des cassettes rembobinées. Combien de temps. Toujours la même question. En ce temps là, je pensais avoir le temps. Je croyais en la destinée. Dans le walkman la bande son s'est déroulée, vitesse normale ou accélérée puis le bouton rewind s'est détraqué, la bande a vrillé. Walkman, cassettes et destinée obsolètes. Rien n'était écrit. Le livre de la vie se raconte au jour le jour. Il y a des hasards, des rencontres, des coïncidences.  Digression: le i tréma est une lettre curieuse, il ne veut pas se mélanger à ses consoeurs les consonnes, il reste libre, indépendant. Pour coïncidence par exemple cela donnerait coincidence, on imagine (du moins je) une pièce carrée avec dans un coin un canard jaune en plastique qui ferait écho à un ciré et des bottes de pluie d'une couleur similaire disposés dans le coin opposé, on se dirait tiens quelle coincidence, c'est jaune, c'est pour aller au bord de l'eau, et on repartirait heureux en pensant que la vie est bien faite. Fin de la digression, aussi superfétatoire qu'inepte.
Donc hier soir, théâtre comble, des musiciens en chair et en os jouant de vrais instruments, un chanteur suisse immigré amoureux de Carcassonne, des inconnus assis dans des fauteuils rouges et dans un coin une coïncidence. Une étrange histoire, une mère et son fils que je croise régulièrement dans des lieux culturels depuis plus de 15 ans. La 1ère fois c'était en mai 2004 à un concert de Cali au théâtre de Montauban, soit à 200 km de chez moi. Cette dame était dans la salle avec son fils de 18 mois environ (âge de mon fils à cette époque), ils se remarquaient tous les deux car la soirée n'était pas adaptée à un enfant de cet âge. J'ai eu la surprise de les revoir régulièrement à Carcassonne sans jamais leur parler. Puis un jour de pluie, en allant assister au vernissage d'une exposition à Montolieu, je m'arrête pour prendre des autostoppeurs, surprise Madame X et son fils ! Je ne leur ai pas dit que je me souvenais de cette 1ère rencontre 15 ans plus tôt. J'ai juste dû réfréné un fou rire qui s'était invité en réponse à cette coincidence. Peu de temps après, ils m'ont interpelée lors d'une autre exposition pour que je les ramène chez eux. Cette mère a l'air d'être seule et sans trop de ressource, mais semble vouloir offrir à son fils une culture artistique, des images de belles choses, des expériences qui ne coûtent rien, qui d'ailleurs ne s'achètent pas. Cette mère et son fils me touchent. Je n'ai pas osé aller leur parler hier soir. J'ai vu Madame sortir 2 billets de 10 euros en échange des places achetées à un particulier, au 3ème balcon sûrement. Et j'ai eu honte. Honte de moi avec mes invitations, honte de toutes les places réservées aux élus et notables qui restent vides. Mais Miss France n'a pas encore réussi à rétablir la paix dans le monde ni à gommer toutes les injustices. Puis cela ne m'a quand même pas empêchée de profiter du concert. J'espère qu'ils ont eux aussi passé une bonne soirée. La prochaine fois, j'irai leur parler.
 

Dans 2020

A votre guise

Par Le 07/03/2020

C'est un lieu commun de dire et de redire que le temps passe. Le début de ma phrase est déjà du passé, un temps qui ne reviendra pas, le point final est du futur à présent, mais une fois ce futur atteint, il deviendra passé. Le présent existe-t-il vraiment ? Il dure le temps d'une inspiration, à l'expiration l'air appartient au passé.
Le défi de ce blog était au départ d'écrire un billet chaque jour. Les bonnes résolutions se sont perdues dans le tourbillon de la vie. Plus de 9 années ont ou sont passées. Des traversées du désert, des éclaircies, des catastrophes naturelles, des longs fleuves tranquilles, une succession aléatoire d'événements non définis par un être supérieur ou l'influence de quelconques planètes. Juste un fil qui se déroule, auquel on veut chercher un sens, une signification profonde. Il est difficile de se résoudre à l'absurdité de la queston existentielle. Alors on remet son destin dans les mains de dieux inconnus, dans la reconnaissance de signes transcendantaux. Il est réconfortant de penser qu'en faisant brûler une bougie on aidera les bonnes âmes à atteindre le paradis. Qu'avec 2 pater 3 ave, un allah akbar, un rite vaudou , une communion, une circoncision, une bar-mitsva, un mandala ou dieu sait quoi encore on s'attirera les faveurs du tout puissant ou des forces bienfaitrices...pourquoi ?
Pourquoi ceux qui tentent de flotter sur une planche en Méditerranée gardent-ils la foi ? Pourquoi et comment trouvent-ils la force d'avancer ?
Moi une simple enveloppe estampillée "trésor public" me donne envie de creuser un terrier et de m'y enfoncer en attendant des jours meilleurs.
Bref aucun rapport, aucun lien de cause à effet. Chacun fait comme il peut, avec Allah, Bouddha, Jésus, Jéhovah, Google, Amazon, Ikéa. L'essentiel est de se distraire , de ne pas ressentir l'écrasante absence de signification de notre passage sur ce caillou en perdition. Comme je n'ai pas tous les mots et le talent pour expliquer ce que je ressens, j'emprunte ceux des autres, et pas n'importe qui

Enivrez-vous


    Il faut être toujours ivre. Tout est là : c'est l'unique question. Pour ne pas sentir l'horrible fardeau du Temps qui brise vos épaules et vous penche vers la terre, il faut vous enivrer sans trêve.

    Mais de quoi ? De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. Mais enivrez-vous.

    Et si quelquefois, sur les marches d'un palais, sur l'herbe verte d'un fossé, dans la solitude morne de votre chambre, vous vous réveillez, l'ivresse déjà diminuée ou disparue, demandez au vent, à la vague, à l'étoile, à l'oiseau, à l'horloge, à tout ce qui fuit, à tout ce qui gémit, à tout ce qui roule, à tout ce qui chante, à tout ce qui parle, demandez quelle heure il est ; et le vent, la vague, l'étoile, l'oiseau, l'horloge, vous répondront : « Il est l'heure de s'enivrer ! Pour n'être pas les esclaves martyrisés du Temps, enivrez-vous sans cesse ! De vin, de poésie ou de vertu, à votre guise. »

Charles Baudelaire - Le Spleen de Paris, XXXIII

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